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Histoire amoureuse des Gaules; suivie des Romans historico-satiriques du XVIIe siècle, Tome IV
Histoire amoureuse des Gaules; suivie des Romans historico-satiriques du XVIIe siècle, Tome IV

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Histoire amoureuse des Gaules; suivie des Romans historico-satiriques du XVIIe siècle, Tome IV

Язык: Французский
Год издания: 2017
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La fausse comtesse, qui s'aperçut bien de son malheur, ne fit pas semblant de le connoître, et revenant de son feint assoupissement, elle dit au grand Alcandre: – «Nous nous arrêtons ici trop longtemps; que pourra-t-on dire de nous? – Vous avez raison, Madame, lui répliqua-t-il, nous ne faisons rien ici; mais on ne peut rien dire qui vous fasse tort, quand on sauroit même ce qui s'est passé.»

Comme le grand Alcandre achevoit de parler, on vit venir du monde de divers endroits, où ils se mêlèrent eux-mêmes, sans qu'on y prît garde; après cela, chacun alla se reposer le reste de la nuit.

Qui pourroit représenter les inquiétudes où étoit le grand Alcandre, après le malheur qui venoit de lui arriver? Il éprouva tout ce que le déplaisir, la honte et le désespoir ont de plus cruel: – «Faut-il, disoit-il, que ce moment favorable que j'avois tant désiré, soit le plus fatal et le plus malheureux de ma vie? Que le seul moment où celle qui m'a tant fait souffrir se vient jeter entre mes bras, me devienne inutile par ma lâcheté! C'est un affront que je ne puis me pardonner à moi-même. Toutes mes autres disgrâces n'étoient rien en comparaison de cette dernière. Être rebuté par une maîtresse, c'est un malheur assez ordinaire; mais se voir au comble de toutes les faveurs qu'on en peut jamais espérer, et ne profiter pas d'un temps si précieux, je ne vois rien qui puisse égaler un tel désastre.» Puis revenant à lui-même, il disoit: «c'est pourtant quelque douceur, que cette cruelle se soit enfin attendrie, et il n'a pas tenu à elle que je n'aie été le plus heureux de tous les amants. Tentons encore la fortune; elle ne me sera pas toujours contraire; celle que j'ai pu toucher, tout foible que j'ai paru, ne sera pas peut-être insensible, quand j'aurai repris mes forces.»

Dans cette pensée, il reposa quelques heures assez tranquillement, et dès que l'heure de se lever fut venue, et qu'il eut pris tout ce qu'il jugea lui être meilleur pour lui donner du courage et de la force, il se rendit dans le bois. L'heure du matin fut employée à la promenade, et le grand Alcandre, qui cherchoit partout la comtesse, ne l'eut pas plus tôt aperçue que, se dérobant insensiblement du reste de la compagnie sur quelque léger prétexte, il l'alla d'abord accoster. Quoique les dames qui l'accompagnoient ne soupçonnassent pas que le Roi eût le moindre attachement pour elle, voyant néanmoins qu'il lui adressoit toujours la parole, et qu'il témoignoit la vouloir entretenir en particulier, elles s'écartèrent par respect et les laissèrent seuls. Le grand Alcandre, continuant sa promenade avec elle vers l'endroit du bois qui lui parut le plus favorable à son dessein, l'entretint d'abord de choses indifférentes; puis, étant entrés dans une autre allée, où ils ne virent personne, ils se trouvèrent près d'une grotte, où le grand Alcandre dit à la comtesse qu'il vouloit lui faire voir quelques raretés qu'elle n'avoit pas peut-être remarquées; comme il ne songea qu'à profiter de l'occasion, il ne s'amusa pas à parler à la comtesse de ce qui s'étoit passé le jour précédent, et moins encore à lui en faire quelques méchantes excuses; il ne vouloit pas réveiller de si fâcheuses idées, et il songeoit à se justifier auprès d'elle d'une manière plus forte et plus convaincante, bien plus par les effets que par les paroles.

Dans cette généreuse résolution, et se sentant une vigueur extraordinaire, il embrassa sa maîtresse, et, sans lui donner le temps de lui demander ce qu'il vouloit faire, il alloit se saisir d'un bien qu'il avoit perdu, à ce qu'il croyoit, la nuit précédente par sa seule faute, et qu'il prétendoit être dû à son amour. La comtesse, qui ne savoit rien de tout cela, repoussa la main du Roi avec sa sévérité ordinaire, et lui demanda fièrement qui l'avoit rendu si hardi. Le Roi, qui crut qu'elle lui reprochoit sa faiblesse du jour précédent, lui dit: – «Vous avez raison, Madame, de vouloir savoir de moi qui m'a rendu si hardi, après la honteuse lâcheté où vous me vîtes tomber la nuit passée. – Je ne sais de quoi vous me parlez, lui répliqua froidement la comtesse.» Le Roi, qui crut toujours qu'elle vouloit dissimuler, et qui se flattoit peut-être qu'elle le vouloit épargner, en faisant semblant de ne se souvenir plus d'une chose qui le couvroit de honte: – «Je le veux bien, Madame, lui dit-il, que nous oubliions le passé, pourvu que vous me permettiez de profiter de ce moment favorable; ne vous opposez donc plus à mes désirs; je suis prêt à vous donner des marques si fortes de mon amour, qu'il ne tiendra plus qu'à vous que je ne sois le plus heureux de tous les amants. – Je vous ai dit si souvent, lui répliqua la comtesse, que j'ai pour vous toute l'estime et toute l'affection que l'honneur me peut permettre; vous devez, ce me semble, être content, et ne m'en demander pas davantage. – Il me semble pourtant, lui dit cet amant passionné, que, la dernière fois que je vous ai vue en masque, vous m'avez fait concevoir d'autres espérances; est-ce qu'en reprenant vos habits ordinaires, vous avez repris cette cruauté qui me fait mourir? – Je vous ai déjà dit, lui répliqua la comtesse, que je ne sais de quoi vous me parlez; mais je veux bien vous apprendre que je suis toujours la même, et que le masque peut bien déguiser mon visage, mais non pas changer mon cœur; apparemment vous aurez pris quelque autre pour moi.»

Le grand Alcandre, qui crut qu'elle se repentoit des avances qu'elle lui avoit faites la nuit précédente, ne voulut pas la presser davantage, de peur de l'aigrir, sachant que les femmes ne veulent jamais avouer leur défaite. Il cessa donc de lui parler d'une chose qu'elle vouloit désavouer, et il songea à faire naître une occasion semblable à celle qu'il avoit perdue, et surtout à en profiter mieux qu'il n'avoit fait.

Il ne l'eut pas plus tôt quittée, qu'il forma le dessein de continuer la mascarade dès qu'il feroit nuit, s'imaginant qu'à la faveur du masque et des ténèbres, il trouveroit sa maîtresse dans les mêmes dispositions pour lui, où il avoit cru la trouver la nuit précédente. – «Je vois bien, disoit-il en soi-même, qu'un reste de pudeur ne permet pas à cette comtesse de m'accorder pendant le jour ce qu'elle ne me refusera pas la nuit, et ce que j'aurois déjà obtenu d'elle sans mon malheur. Peut-être, ajouta-t-il, qu'elle craint un second affront, et que je tombe dans une disgrâce semblable à celle qui m'est arrivée. Mais je prendrai si bien mes mesures, qu'elle n'aura pas sujet de se plaindre de moi.»

Flatté de cette pensée, il donna les ordres nécessaires pour une seconde mascarade. La plupart de ceux qui s'étoient masqués le jour précédent, changèrent d'habit et de masque, soit qu'ils voulussent plaire au Roi par cette diversité, soit qu'ils eussent quelqu'autre dessein. La comtesse, qui n'en avoit aucun, et qui ne se déguisa que parce qu'elle ne pouvoit pas s'en dispenser, n'y fit aucun changement, et parut avec les mêmes habits. La Montespan, qui la vouloit encore imiter pour les raisons que j'ai dites, sachant le dessein de la comtesse, par cette même fille qui étoit à sa dévotion, ne changea rien non plus à son ajustement; et voulant achever ce qu'elle avoit commencé, elle résolut de s'écarter quand il feroit nuit, et de se rendre dans le même endroit où le Roi l'avoit trouvée le jour précédent, lorsqu'il l'avoit prise pour la comtesse, s'imaginant bien qu'il ne manqueroit pas d'y aller lui-même, dans l'espérance d'y rencontrer celle qu'il cherchoit, et parce que c'étoit un lieu tout-à-fait propre à son dessein.

Cependant elle fit avertir le comte, par des gens qui dépendoient d'elle, de prendre garde à sa femme; qu'ils avoient remarqué la nuit passée, qu'une dame, vêtue à peu près comme la comtesse, étoit entrée dans un cabinet du bois assez écarté, avec un homme qu'ils ne connoissoient point et qu'il pourroit bien être qu'ils continueroient le même manége; que s'il le trouvoit bon, ils feroient garde en cet endroit et l'iroient avertir de ce qu'ils auroient vu. Le comte leur répondit qu'ils fissent comme ils voudroient, mais qu'il étoit assuré de la vertu de sa femme.

Dès que nos masques se furent mis en campagne, la Montespan, ou la fausse comtesse, se déroba de la foule, et alla toute seule dans ce petit cabinet où elle avoit vu le Roi le jour précédent. Ce prince, qui venoit de voir qu'une dame, habillée à peu près comme la comtesse, prenoit ce chemin écarté, ne douta point que ce ne fût elle-même. Et comme il étoit aussi en masque, il n'eut pas de peine à se tirer de la foule, et à se rendre insensiblement vers le même endroit. Il n'y fut pas plus tôt, qu'il crut d'y voir sa chère comtesse, assise sur le lit de gazon qui étoit dans ce petit cabinet, et c'étoit aussi la même personne qu'il y avoit vue la nuit précédente. Il l'aborda incontinent, et ôtant son masque, il se donna à connoître.

La dame le reçut comme elle devoit; mais, sachant déjà par expérience qu'un masque sur le visage déguise beaucoup la voix, elle pria le grand Alcandre de l'excuser si elle ne levoit pas son masque, lui disant qu'elle savoit bien le respect qu'elle devoit à Sa Majesté43, mais qu'elle ne voudroit pas pour rien au monde être reconnue seule avec un homme dans cet endroit écarté. Le Roi, qui n'étoit que trop prévenu de la délicatesse de la comtesse, pour ce qui regarde l'honneur et la réputation, n'eut pas de peine à croire que la modestie et la honte étoient la seule raison qui l'empêchoit de quitter son masque. – «Il n'importe, lui dit cet amant, demeurez comme vous êtes, puisque vous le trouvez bon, quoique je sois privé par là de la vue d'un objet si charmant. Je suis choqué seulement de ce terme de respect dont vous venez de vous servir; laissons là le respect, je vous en prie, et donnez-moi quelques preuves de votre tendresse.»

En disant cela, il se mit à baiser sa gorge, puisqu'il n'en pouvoit pas faire autant à son visage. Elle le repoussa quelque temps, plus par ses gestes que par ses paroles, de peur de se découvrir. Enfin, après une feinte résistance, elle lui accorda tout ce qu'il voulut; et cet amant qui crut posséder une nouvelle conquête, goûta des douceurs qu'il n'avoit point encore senties: ce qui fait voir qu'en amour, c'est l'imagination qui fait tout. Il ne pouvoit se lasser de caresser sa chère comtesse, et se croyant victorieux de cette fière beauté, il voulut se dédommager de tout le temps qu'il avoit perdu. – «Il faut avouer, disoit ce crédule amant, qu'il n'est rien de si doux qu'un bonheur qui a coûté tant de soupirs et tant de peines!» Il trouvoit en sa maîtresse mille nouveaux charmes; et cependant c'étoit cette même Montespan dont il avoit joui tant de fois, dont il commençoit même à se dégoûter, et qui lui donnoit pourtant mille nouveaux plaisirs sous cette nouvelle forme. Cette feinte comtesse profita, comme elle devoit, de l'ardeur excessive où étoit le Roi, et, quoique cela ne s'adressât point directement à elle, elle le recevoit à bon compte; et si la jalousie ne s'y fût mêlée, elle n'auroit jamais été si satisfaite de l'amour du grand Alcandre. Au fond elle étoit jalouse d'elle-même, car la comtesse n'étoit là qu'un fantôme; elle n'y étoit qu'en idée, et les plaisirs qu'elle goûtoit avec le Roi étoient tout-à-fait réels. Aussi voulant y répondre de son côté, elle l'embrassoit avec beaucoup de tendresse, et lui faisoit entendre par ses regards, plutôt que par ses paroles, qu'elle étoit aussi contente que son amant.

Après ces félicitations muettes qu'ils se faisoient l'un à l'autre de leur commun bonheur, il fallut se séparer; un bruit importun, que ces deux amants entendirent, troubla cette petite fête. La dame, qui ne vouloit pas être découverte, sortit promptement de ce cabinet, et, traversant l'allée qui le joignoit, vint par un autre chemin se joindre à la compagnie.

Elle ne sortit pas pourtant si secrètement, que le comte de L… mari de la comtesse, ne s'en aperçut. Il alloit avec la comtesse sa femme, vers ce même endroit, d'où on lui avoit dit qu'une femme, qui ressembloit à la sienne, étoit sortie assez en désordre la nuit précédente, ayant un homme avec elle. Il vit en effet que celle qui venoit de sortir de ce cabinet de verdure avoit le port et la taille de la comtesse, et portoit des habits tout-à-fait semblables. Cette vue le frappa d'abord, non pas qu'il eût aucun soupçon de sa femme, qui ne l'avoit point quitté, mais il crut qu'il y avoit quelque chose de mystérieux dans cette ressemblance; et, tirant dans ce moment sa femme à l'écart, il lui fit part de ce qu'il venoit de voir, et de l'avis qu'on lui avoit donné quelques heures auparavant. Ils ne savoient l'un et l'autre que penser de tout cela; mais cette conformité d'habillement leur fit soupçonner quelque malice. Alors la comtesse se ressouvenant du discours que le Roi lui avoit tenu le matin, ne douta point que ce prince n'eût été dupé, et qu'il n'eût pris pour elle une autre qui lui avoit été plus favorable, comme elle en pouvoit juger par les discours que le Roi lui avoit tenus. Ce qu'elle trouvoit de fâcheux pour elle, c'est qu'elle voyoit que, par une noire malice, on vouloit commettre sa réputation dans le temps qu'on trompoit le Roi, et qu'on abusoit de sa ressemblance pour la faire passer pour ce qu'elle n'étoit pas.

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1

Le duc de La Feuillade (note de l'édit. de 1719). – Il était mort subitement dans la nuit du 18 au 19 septembre 1691, et non le 12 mai 1697, comme on l'a dit dans une récente édition de cette «histoire». – Voy. Dangeau, t. III, pp. 400-402.

2

Voy. la Préface, en tête de ce vol.

3

Voy. la Préface.

4

Voy. passim et à la table.

5

Voy. la Préface, en tête de ce vol.

6

Voy. t. II, pp. 74, 400, et à la table. – On connaît la fanatique adoration du duc de La Feuillade pour Louis XIV; quant à ses complaisances en fait d'amour, le Roi, qui avoit peu de sympathie pour lui, ne lui auroit pas fait l'honneur de les lui demander ou de les accepter.

7

Jusqu'à la folie.

8

Nous sommes en 1672, époque des dernières couches de la Reine, et jusque-là, en effet, les armes de Louis XIV n'avaient pas encore connu les revers qui devaient attrister la fin du règne. – Voy. plus loin, p. 31, note 16.

9

D'abord, immédiatement.

10

Rendez-vous.

11

Richelet traduit: «Blanchir, faire des efforts inutiles.» – Furetière dit: «Blanchir se dit des coups de canon qui ne font qu'effleurer une muraille, et y laissent une marque blanche. En ce sens on dit au figuré de ceux… dont tous les efforts sont inutiles que tout ce qu'ils ont fait, tout ce qu'ils ont dit n'a fait que blanchir.»

12

Des cabinets de verdure.

13

Le texte dit: sujet. —Succès, issue, résultat.

14

Voici ce qui se passait au lever du Roi; nous traçons ce tableau en nous guidant sur l'Etat de la France auquel nous avons emprunté tous les noms du quartier, du trimestre de janvier: – Le Roi s'éveille. Aussitôt M. de Chamarande, chevalier de Saint-Michel, qui, en sa qualité de valet de chambre, était couché sur un lit étendu à terre au pied de celui du Roi, s'approche de Sa Majesté pour lui présenter sa robe de chambre et lui donner de l'eau si elle en demande. Le Roi voulant s'habiller, un garçon de la chambre va avertir à la garde-robe pour faire apporter les habits dans la toilette. – Le Roy s'assied alors sur son fauteuil; le sr Roze, premier valet de garde-robe, qui a pris les chaussons dans le coffret, en donne un au premier valet de chambre qui prend la droite et le laisse à gauche pour habiller Sa Majesté. Un simple valet de garde-robe, le sr de Lissalde, leur présente alors le bas de soie qu'il a pris soin d'attacher au caleçon. Alors chacun d'eux aide de son côté à chausser et vêtir le Roi, s'il n'aime mieux le faire lui-même, ce qui arrive le plus souvent. Ensuite six des pages de la chambre attachés au service du gentilhomme de la chambre qui est en fonctions, non plus ce trimestre mais cette année, le duc de Saint-Aignan, ont le privilége de présenter les mules à Sa Majesté. Cela fait, le Roi prend son haut-de-chausses des mains d'un valet de garde-robe qui lui apporte premièrement des canons ou des petits bas s'il désire en porter: le canon est cet ornement de dentelle qui s'attache au-dessous du genou, au bas du haut-de-chausses; les petits bas ou bas à étrier sont des bas qui ne couvrent que la jambe, et s'arrêtent à la cheville. Le Roi met-il des souliers? le valet les lui noue; des bottes? le valet les lui présente ou les lui met; mais l'honneur de donner les éperons est réservé à M. Nicolas Le Febvre, sieur de Bournonville, écuyer de service.

Voilà le Roi chaussé. Un valet de garde-robe tient la chemise du Roi et la présente d'abord à un prince du sang; en cas d'absence, au duc de Bouillon, grand chambellan, au duc de Saint-Aignan, l'un des quatre premiers gentilshommes, ou enfin à M. le marquis de Guitry de Chaumont, l'un des deux maîtres de la garde-robe. Le Roi ôte alors sa chemise de nuit et met celle qu'on lui donne. Les huissiers, qui sont entrés dans la chambre royale dès que Sa Majesté a eu pris sa robe de chambre, et qui se tiennent à la porte pour l'ouvrir ou la fermer, ce que nul autre ne peut faire, demandent alors au grand chambellan ou à celui des quatre premiers gentilshommes de la chambre qui est de service, quelles sont, parmi les personnes de condition présentes, celles qu'il peut faire entrer. Après cette première admission de gentilshommes favorisés, le maître de la garde-robe met au Roi son pourpoint, lui présente ses mouchoirs, ses gants, et enfin son manteau et son épée, s'il les veut prendre; s'il veut sortir sans épée ni manteau, l'épée est remise à l'écuyer, le manteau au porte-manteau; enfin s'il ne veut ni son épée ni son manteau, on les laisse à la garde-robe. C'est quand le Roi est habillé que l'huissier, le sieur de Rassé, par exemple, laisse entrer toute la noblesse à son choix, et selon le discernement qu'il fait des personnes plus ou moins qualifiées.

15

Voy. le roman de Mme de La Fayette.

16

Ce passage détermine la date de cette histoire. – Louis-François, duc d'Anjou, né le 14 juin 1672, mourut le 4 novembre suivant. Mais si nous connaissons la date de ce petit roman, l'auteur en plaçant son récit à Fontainebleau nous permet de douter de sa véracité. En effet, pendant presque tout l'été de 1672, Louis XIV tint la campagne sur le Rhin; il assista au fameux passage du fleuve, dans les premiers jours de juillet; il quitta le camp de Boxtel le 26 juillet et rentra à Paris le 2, à Versailles le 3 août.

Pendant son voyage, dont la Gazette de France a noté toutes les étapes, la Reine accoucha du jeune prince dont il est ici question; on écrivait de Saint-Germain-en-Laye le 17 juillet à la Gazette: … «Le 13, la Reyne au sortir de ses dévotions en l'église des Récollets, commença de sentir quelques douleurs qui l'empeschèrent d'assister au Conseil; et, sur les dix heures du soir, ces douleurs l'ayant reprise, Sa Majesté se délivra heureusement, environ un quart d'heure après minuit, d'un très-beau prince, qui remplit ce lieu d'une joie extraordinaire.» Le sieur de Villaserre (sic, c'est-à-dire Colbert de Villacerf) fut chargé de porter la nouvelle au Roi, «de la part de la Reyne, qui n'en pouvoit envoyer une meilleure à Sa Majesté, en échange de celles qu'Elle luy mande tous les jours du champ de ses victoires.»

La cour passa à Versailles le reste de l'été au milieu des fêtes. On lit dans la Gazette: «de Versailles, le 23 septembre: – La Cour continue de prendre ici les divertissemens de la saison, entre lesquels celui de la comédie a ses jours. – Le 17, la troupe du Roy y en représenta une des plus agréables, intitulée les Femmes sçavantes, et qui fut admirée d'un chacun. Le 20, les Italiens y jouèrent l'une de leurs pièces les plus comiques. Le 21, la seule troupe royale continua ses représentations avec beaucoup d'applaudissement. Et l'on peut juger par là s'il y a quelque cour en toute l'Europe qui soit divertie de cette manière qui ne peut, aussi, convenir qu'à la grandeur de notre monarque, qui paroît en toutes choses.»

L'année suivante, le Roi reprit la campagne sur le Rhin et la cour ne séjourna pas à Fontainebleau. Nous devions entrer dans ce long détail pour montrer combien le récit de l'auteur peut paraître suspect, puisque l'une des principales circonstances en est si évidemment fausse.

17

La conversation entre la comtesse et son mari, rapportée plus haut, permet en effet de le ranger parmi les maris commodes. Sous son enjouement percent quelques regrets.

18

Terme d'équitation. «Piquer, à l'égard des chevaux, c'est, dit Furetière, les manier avec les éperons ou le poinçon (sorte d'aiguillon dont on piquait la croupe des chevaux). Il faut bien piquer pour aller de Paris à Rome en sept jours.» – On disait, et l'on dit encore, en faisant usage de ce mot, piquer des deux.

19

Le Journal de la santé du Roi pour les années 1672, 1673, 1674, ne parle que de ses maladies ordinaires d'estomac, de ses étourdissements et de ses vapeurs: maladies fréquentes et qui demandoient de grands soins.

20

Ce n'est pas en 1672, mais en 1676, que Mme de Montespan alla aux eaux de Bourbon. Le 8 avril, Mme de Sévigné annonce que la favorite va partir; le 1er mai, qu'elle est partie; le 15 mai, qu'elle est présentement à Bourbon; le 8 juin, qu'elle est partie de Moulins le jeudi pour aller, en suivant le cours de l'Allier et de la Loire, jusqu'à l'abbaye de Fontevrault, où sa sœur étoit abbesse. – Cet anachronisme, rapproché d'autres erreurs, est de nature à diminuer la confiance qu'on pourroit avoir en ce petit roman.

21

«Petite oye, dit Furetière, est ce qu'on retranche d'une oye pour la faire rôtir, comme les pieds, les bouts d'ailes, le cou, le foye, le gesier… Petite oye se dit figurément des rubans et garnitures qui servent d'ornement à un habit, à un chapeau, etc… La petite oye consiste aux rubans pour garnir l'habit, le chapeau, le nœud d'épée, les bas, les gands, etc. —Petite oye se dit, en matière d'amour, des menues faveurs qu'on peut obtenir d'une maîtresse dont on ne peut avoir la pleine jouissance, comme baisers, attouchements, etc.» – A la p. 111 du très-curieux roman intitulé Araspe et Simandre (2 vol. très-petit in-8o, 1672), on lit: «tel craint de donner dans une étoffe trop chère, qui, ajustant avec beaucoup de rubans une bien moindre, ne laisse pas de se trouver agréablement vêtu; c'est ce qu'on appelle la petite oye; c'est ce que nous donnons quelquefois, et ce que (l'auteur est une femme) nous ne devrions jamais donner.»

22

Les eaux de Bourbon avoient alors une vogue qu'elles n'ont pas conservée depuis, bien que leurs effets n'aient pas changé. Le médecin Delorme y attirait une grande clientèle. Mme de Montespan y alla, comme nous l'avons vu plus haut, et c'est là que Lauzun, sorti de prison mais non encore admis à la Cour, alla lui présenter ses hommages et solliciter sa protection.

23

On appelle «troc de gentilhomme» celui qui se fait but à but, troc pour troc, sans donner de l'argent de retour. (Furetière.)

24

Le prince de Marcillac dont il s'agit ici est le même que nous avons rencontré dans le 1er volume de ce recueil, et qui est devenu duc de La Rochefoucauld en 1680, à la mort de son père, François VI, qui lui-même avait porté le nom de Marcillac jusqu'en 1650.

25

Est-ce dans le Quiproquo? Est-ce dans Richard Minutolo? On peut hésiter entre les deux.

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