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Histoire des salons de Paris. Tome 4
Histoire des salons de Paris. Tome 4

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Histoire des salons de Paris. Tome 4

Язык: Французский
Год издания: 2017
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À chaque pas, à cette époque, on trouvait le burlesque s'alliant au terrible!..

Les femmes ne pouvaient alors remédier au mal qui s'était introduit dans ce qu'on appelait la société: car enfin, depuis surtout la rentrée des émigrés, elle se recomposait d'elle-même. Mais le mélange forcé était plus insupportable encore que la solitude. Les femmes des parvenus haïssaient tout naturellement une conversation intéressante, parce qu'elles y étaient étrangères. Continuellement occupées d'étiquette, point sur lequel elles étaient encore plus ignorantes que sur tout le reste, elles marchandaient une révérence et comptaient les visites; ce qui était simple, parce quelles devaient craindre à chaque moment qu'on se rappelât leur basse origine, et très-souvent plus que cela, et qu'alors on ne voulût leur manquer. J'ai vu longtemps encore à la Cour impériale de ces pauvretés, de ces mièvreries qui élevaient des querelles sur une visite plus ou moins longue, plus ou moins différée…

La conversation même la plus simple se ressentait, comme on doit le croire, de l'état de la société à cette époque. Madame de Genlis, femme élégante et surtout difficile dans tout ce qui tient à la grande et même l'excessive recherche du langage, souffrait plus qu'un autre de ce bouleversement complet. Un jour, elle voit arriver chez elle, rue d'Enfer, où elle demeura avant d'aller à l'Arsenal, une femme dans une voiture fort élégante, attelée de deux beaux chevaux, et conduite par un cocher dont la mise eût paru étrange sans un petit nègre encore plus ridicule, qui était complètement habillé en Maure, et qui n'avait pas plus de trois pieds de haut: c'était ce personnage qui ouvrait et fermait la portière.

Cette dame, qui elle-même était une caricature par sa mise, portait une robe d'une forme outrée et absurde. Sur sa tête était un très-petit chapeau de velours avec deux plumes tombantes. Elle se fit annoncer sous le nom de madame DE Privas.

En entendant ce nom qui promettait quelque chose, madame de Genlis se leva et fit deux pas au-devant d'elle.

MADAME PRIVAS

Vous devez être joliment surprise de me voir, n'est-ce pas? Eh bien! qu'est-ce que vous faites donc! rasseyez-vous donc!

MADAME DE GENLIS, avançant un fauteuil à la dame

Veuillez vous asseoir, madame…

MADAME PRIVAS, s'asseyant lourdement dans la bergère

Tiens, que c'est drôle! vous dites MADAME! vous ne dites pas citoyenne, vous!.. vous avez bien raison! Au reste, je l'avais parié avec M. Privas, je lui ai dit: Je te parie six francs que la citoyenne Genlis me dira MADAME; il a parié que non, parce qu'il prétend que vous avez peur.

MADAME DE GENLIS, souriant doucement

Mais comment M. de Privas, que je n'ai pas l'honneur de connaître, me fait-il celui de juger ainsi mes sentiments les plus intimes?

MADAME PRIVAS

Oh! il vous connaît bien, allez, lui!.. tiens! qu'est-ce que c'est donc que tout ça?..

Et elle se mit à retourner et à remuer tout ce qui était sur la table de madame de Genlis… Il y avait, entre autres choses, un charmant livre de la forme de nos albums d'aujourd'hui, dans lequel madame de Genlis peignait alors une guirlande de fleurs allégoriques ou plutôt emblématiques. Elle avait fait un langage des fleurs. Il y a aussi, je crois, une nouvelle d'elle63 qui a donné l'idée à M. Révéroni de Saint-Cyr de faire son roman de Sabina d'Herfeld. Madame de Genlis fut alarmée pour le sort de ses fleurs, et puis elle voulait savoir ce qui lui valait une visite aussi étrange.

– Permettez-moi, madame, lui dit-elle en refermant doucement le livre, de vous prier de ne point toucher à cet ouvrage. Il n'est point terminé et pourrait s'effacer… et puis… mon temps est bien limité… il n'est même pas à moi.

MADAME PRIVAS

Vraiment!.. pauvre chère dame!.. voyez-vous bien! cette chienne de révolution!.. c'est ce que je dis toute la journée à M. Privas!.. là, une dame comme il faut, une dame comme vous, qui a roulé su l'or et su l'argent… en être réduite là, à travailler pour vivre!.. Ah! mon Dieu! mon Dieu!..

MADAME DE GENLIS, presque impatientée

J'ai l'honneur de vous faire observer, madame, que c'est pour cette raison que mon temps est pris par mon travail… Puis-je savoir ce qui me procure l'avantage de vous voir?

MADAME PRIVAS, la regardant avec admiration

Comme vous parlez bien!.. voilà comme je voudrais parler!.. c'est ce que je dis toute la journée à M. Privas. Il a été longtemps à le comprendre, mais j'ai gagné la bataille.

Madame de Genlis sourit doucement: en effet, madame Privas paraissait réunir toutes les conditions nécessaires pour remporter la victoire dans une lutte à coups de poing. Elle avait une taille au-dessus de la médiocre: son embonpoint très-prononcé, ses bras et ses mains surtout, d'un volume respectable dans un combat, devaient lui assurer la victoire… Son visage eût été joli (car elle était encore jeune et ses traits étaient agréables), s'il avait eu une expression quelconque; mais elle n'en avait jamais aucune et sa bouche souriait constamment pour montrer des dents assez jolies, ou plutôt même sans motifs. Ses yeux étaient bleus, et, avec ou sans regard, ils paraissaient toujours immobiles. Son nez était bien fait, la forme de son visage agréable, ses cheveux d'une jolie couleur: eh bien! tout cela ne lui servait à rien. On aurait même autant aimé qu'elle fût laide, parce qu'elle aurait peut-être eu de l'esprit. Mais on va voir que ce n'était pas l'intention qui lui manquait.

Elle continuait à regarder madame de Genlis avec une expression admirative vraiment comique, et finit par amuser madame de Genlis, qui, ainsi que toutes les personnes d'esprit, vit d'abord le côté plaisant de la chose. Dans le même moment, la femme de chambre de madame de Genlis annonça M. Millin.

MADAME DE GENLIS, lui tendant la main, et lui faisant un signe d'intelligence en lui indiquant la dame étrangère

Je suis bien aise de vous voir, mon ami… et vous attendais avec une vive impatience… ma copie est prête, nous n'avons qu'à l'assembler.

M. MILLIN, ne comprenant pas très-bien et croyant qu'il s'agit d'une lecture

Eh bien! je ne vois pas ce qui s'oppose à ce que la lecture se fasse tout de suite… Madame en est-elle?..

MADAME PRIVAS

Une lecture!.. certainement que j'en suis!.. C'est-il beau ça!.. une lecture!..

MADAME DE GENLIS

Je vois, madame, avec regret que je suis forcée de vous prier d'abréger votre visite qui m'honore, sans doute, mais à laquelle je ne puis donner l'attention qu'elle mérite, étant obligé de lire à M. Millin un ouvrage de moi, auquel vous ne prendriez aucun plaisir… et puisque vous ne voulez pas me dire le motif pour lequel vous êtes venue me chercher dans ma retraite, je suis forcée…

MADAME PRIVAS

Eh là! là! comme elle s'emporte donc, cette petite dame! Eh bien! voyons! soyez donc gentille! on ne veut pas vous faire de mal… au contraire… voilà l'histoire. Mon mari et moi nous sommes de bonnes gens… nous sommes riches… très-riches même… M. Privas, voyez-vous, a vendu des farines aux armées… il a eu des fournitures dans un bon temps, le temps où le blé manquait… il a eu des protecteurs… on l'a payé, enfin… et bien payé aussi. Nous sommes riches, et riches en honnêtes gens.

MILLIN, à demi-voix

Oui, comme des accapareurs! Oh! les voleurs!

MADAME DE GENLIS

Enfin, madame…

MADAME PRIVAS

M'y voilà!.. m'y voilà!.. comme vous êtes vive!.. m'y voilà!.. Vous saurez donc que M. Privas et moi nous aimons beaucoup le monde, mais le beau monde… Nous voulons tenir maison, recevoir, nous faire honneur de notre belle fortune, enfin; et pour cela il me faut quelqu'un qui sache ce que c'est que la belle société, voyez-vous… Moi j'aime les gens comme il faut. Je n'aime pas ces parvenus qui se donnent des tons, comme si nous n'étions pas tous de la même farine. J'ai lu les Veillées du Château, j'ai lu Adèle et Théodore, et j'ai dit à M. Privas: Voilà la dame qu'il nous faut… et alors, voyez-vous, je suis venue moi-même, pour vous expliquer que vous gagnerez plus gros avec nous qu'avec vos livres, et que vous serez heureuse, parce que vous entendez bien que je ne vous tyranniserai pas… Voulez-vous accepter, chère madame?

MADAME DE GENLIS

Je suis fort sensible, madame, à l'obligeance de votre offre, mais je ne puis y répondre.

MADAME PRIVAS, stupéfaite

Vous me refusez!

MADAME DE GENLIS

Croyez que je n'en suis pas moins sensible à votre bonté pour moi, madame; mais j'ai l'honneur de vous dire que je ne puis accepter.

MADAME PRIVAS

Mais pourquoi? Songez donc que nous vous donnerons douze mille francs par an, si vous voulez venir vivre avec nous. L'hiver, nous occupons un bel hôtel dans la rue Saint-Dominique; et l'été, nous le passons tout entier dans une superbe terre que M. Privas vient d'acheter en Bourgogne, près d'Autun.

MADAME DE GENLIS, avec émotion

Près d'Autun!.. C'est dans les environs d'Autun qu'est le château qui appartenait à mon père, et où j'ai passé mon enfance!.. Mais, encore une fois, madame, recevez mes remerciements, sans chercher à ébranler ma résolution; elle est positivement arrêtée, et pour vous éviter toute insistance, je dois vous dire que jamais je ne sacrifierai ma liberté; je suis et veux rester indépendante: voilà mon dernier mot.

MADAME PRIVAS

Hé bien! vous avez tort: vous seriez toujours indépendante, parce que vous auriez en nous des amis… et écoutez donc, voyez-vous, des amis qui ont cinq millions de fortune, c'est beau, ça!..

MADAME DE GENLIS

Tous vos efforts, madame, en me prouvant que vous avez la bonté de tenir à moi, me donnent encore plus de regrets… Mais, je vous le répète, la chose ne peut avoir lieu.

MADAME PRIVAS

Mon Dieu! vous n'êtes pas raisonnable!

MILLIN, avec impatience

Pardieu! madame, c'est vous qui ne l'êtes guère! Voilà une heure que Madame vous répète qu'elle ne veut pas aller avec vous, et vous ne la comprenez pas!

MADAME PRIVAS, regardant Millin de travers

Hé bien! qu'est-ce que c'est donc? De quoi se mêle-t-il, ce monsieur? Est-il votre parent, ma chère dame?.. (Elle regarde Millin alternativement avec madame de Genlis.) Écoutez, voyez-vous, si vous êtes habitués à vivre ensemble, nous prendrons le cousin avec nous! oh! mon Dieu! je suis bien sûre que M. Privas ne me désavouera pas.

MILLIN, éclatant de rire

Eh? non! non… nous sommes amis, bons amis; mais pas du tout cousins, comme vous l'entendez!..

MADAME DE GENLIS, plus sérieusement et en se levant

Toute prolongation de conversation à ce sujet est tout à fait superflue. J'ai eu l'honneur de vous répondre, madame, et n'ai plus rien à vous dire.

MADAME PRIVAS, se levant aussi

Eh bien! donc, adieu, ma bonne dame! Je m'en vais bien affliger M. Privas, car il se faisait une fête de vous voir, le cher homme; et… puisqu'il faut vous le dire, le château de Saint-Aubin est bien connu de lui, allez!.. il a demeuré sur les terres de votre père, M. Privas.

MILLIN, tout en se promenant

Il a peut-être été son meunier!..

MADAME PRIVAS

Eh bien! s'il l'a été, qu'est-ce que ça vous fait?.. Allons, bonjour, madame, je m'en vais bien fâchée de ne pas vous emmener; si vous vous ravisez, écrivez-moi: voilà mon adresse…

Elle mit sur la table un morceau de vilain carton avec son nom et son adresse grossièrement imprimés, et faisant une belle révérence à madame de Genlis, elle sortit en n'adressant qu'une inclination de tête à Millin… Madame de Genlis et lui la virent monter dans sa voiture, où l'enferma le petit nègre, qui, par parenthèse, s'appelait Othello, en l'honneur de Talma probablement, dont ce rôle était alors le triomphe. Lorsqu'elle fut dans sa voiture, madame Privas cria d'une voix forte:

– À la maison!..

Ce que le petit Maure répéta en fausset.

Après le départ de cette femme, madame de Genlis croisa ses mains, puis, les laissant retomber:

Eh quoi! dit-elle, la France en est-elle à ce point, que la fortune et les biens de tant de malheureux qui souffrent dans l'exil et la pauvreté, tant d'héritiers des victimes massacrées, soient dans les mains de telles gens!.. Cinq millions! ainsi cette femme a deux cent cinquante mille livres de rentes!.. peut-être le château de mon père, tandis que je travaille pour vivre… Voilà donc le résultat de la Révolution!..

Elle tomba rêveuse sur une chaise, et y demeura assez longtemps sans que Millin la troublât. Il comprenait trop bien sa dernière exclamation64. Il dit enfin:

– Oui, ce serait une bien triste besogne que celle d'avoir provoqué la révolution, si elle n'avait pas eu d'autres résultats que celui de tuer et de ruiner les légitimes propriétaires pour enrichir les intrigants… oui, ce serait en effet bien triste!

Madame de Genlis se leva et marcha quelque temps assez agitée; puis lorsqu'elle se rassit, elle était calme, et reprit la conversation sur madame Privas avec une grande liberté d'esprit.

– Comment l'avez-vous refusée sans réfléchir? lui dit Millin. Songez donc, douze mille francs! et cette femme paraissait tenir tellement à vous qu'elle en eût donné quinze et même vingt pour vous avoir.

– Et moi, jamais je ne sacrifierai ma chère liberté à une fortune, quelle qu'elle soit; et puis, savez-vous bien que cinquante mille francs ne paieraient pas l'ennui de vivre avec une pareille femme!.. Est-il donc vrai que beaucoup de ces parvenus soient ainsi?

Dans ce moment, on annonça M. de Valence.

– Tenez, dit Millin, voici quelqu'un qui pourra vous donner là-dessus tous les renseignements possibles.

– Sur quoi? dit M. de Valence.

MILLIN

Sur la société d'aujourd'hui… Madame de Genlis est surprise du ton qui règne maintenant dans le monde, et, pour dire la vérité, elle a grandement raison.

M. DE VALENCE

Sans doute elle a raison d'en être choquée; mais elle a tort d'en être surprise. C'est une conséquence toute naturelle du long bouleversement qui a mis la France sens dessus dessous… Comment pouvez-vous être étonnée de cela? répéta-t-il en se tournant vers sa belle-mère.

MADAME DE GENLIS

Que les choses se soient dérangées, je le conçois; mais qu'elles aient pris cette attitude et cette couleur, tandis que parmi ces parvenus, et même dans leurs amis, il y a tant de gens comme il faut, voilà ce qui m'étonne, et en même temps me choque. Ainsi, par exemple, je dînais l'autre jour chez ma tante65, qui, je le croyais, devait avoir conservé les anciens usages: pas du tout; elle aussi a sacrifié à la mode et aux exigences de l'époque. De son temps et du mien, car nous sommes contemporaines, nous ne mettions pas d'hommes à côté de nous à table. Le maître et la maîtresse de la maison choisissaient entre eux les quatre femmes les plus distinguées de l'assemblée et les engageaient à se mettre à côté d'eux66, et tout cela sans faire de scène. On était poli pour celles qu'on distinguait, et l'on ne désobligeait personne. Maintenant ce n'est plus cela: non-seulement le maître de la maison vient avec beaucoup de bruit prendre la femme la plus considérable, et lui fait traverser le salon devant toutes les autres, à qui elle marchera sur les pieds, si elle ressemble à ma marchande de farine de tout à l'heure… mais ce n'est pas tout, il lui faut encore un second: il appelle alors l'homme le plus élevé en grade après lui, pour enfermer la pauvre femme qui est à sa droite entre deux ennuyeux qu'elle aurait évités, si elle eût été libre.

M. DE VALENCE

Sans doute, cela était; et cela n'est plus. Les usages sont des lois tant qu'ils conviennent; le jour où d'autres exigences nécessitent d'autres usages, eh bien! ils s'établissent et remplacent les anciens… Mon Dieu!.. c'est la marche commune. L'origine de ce dont vous parliez tout à l'heure remonte beaucoup plus loin que les derniers temps de la révolution. Cet usage de placer des femmes en leur faisant une politesse marquée date, au contraire, de celui des assemblées. Il fallait souvent flatter un député: pour l'acquérir à son parti, on plaçait alors sa femme à côté de soi, au grand mécontentement de dix autres; mais l'esprit de parti ne transige pas, et avec la politesse moins qu'avec toute autre chose. Les femmes ont appelé les hommes à côté d'elles dans le même but.

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1

Mais elle avait été présentée comme marquise de Montesson. – Sa conduite fut admirable par la suite. Lorsque Louis XVI fut comme prisonnier aux Tuileries en 91 et 92, madame de Montesson demanda et obtint alors facilement la permission d'aller faire sa cour. – Louis XVI l'accueillit comme sa cousine, et fit souvent sa partie de trictrac avec elle. – Je trouve la conduite de madame de Montesson fort belle, car elle pouvait se rappeler qu'au temps du bonheur elle avait été repoussée avec une sorte de mépris! mais loin de là, elle oublia le passé et ne vit que le malheur présent de ceux qu'elle fut consoler.

2

On lui proposa la charge de surintendante, qu'elle refusa.

3

En allant à Marengo, le premier Consul alla visiter les îles Borromées. Dans le jardin d'Isola Bella il y avait deux lauriers fort beaux au milieu de beaucoup d'autres. Le général en chef prit un canif, et dans l'écorce de l'un de ces jeunes arbres il grava le mot Battaglia… Il fut à Marengo et fut vainqueur; le souvenir de ce laurier le poursuivit longtemps, et depuis à la Malmaison je l'ai entendu le rappeler souvent; j'ai vu moi-même ce laurier à l'Isola Bella. Je ne sais qui a gravé sur l'un des autres lauriers le mot Vittoria. Tous deux ont grandi… et maintenant les deux mots battaglia et vittoria touchent presque aux cieux!..

4

On disait beaucoup plus, mais je ne le crois pas. M. de Saint-Far, pour augmenter les torts de madame de Montesson, prétendait qu'elle avait de grands revenus, et portait sa fortune à 300,000 fr. de rentes. Je suis sûre du contraire.

5

Elle fut toujours parfaite pour moi, et j'en ai eu la preuve dans deux visites qu'elle me fit, l'une à l'époque de ma première couche, où je faillis périr, et l'autre à la mort de ma mère. – Elle ne faisait de visites À PERSONNE, si ce n'est à ceux qu'elle aimait et qui lui plaisaient.

6

Madame Georgette Ducrest. Elle chante à ravir et écrit également bien. Je l'ai vue depuis à la Malmaison, d'où une jalousie basse et même une haine envieuse l'ont ensuite exilée, à notre grand regret.

7

Madame de Genlis est souvent méchante, même pour quelques-uns des siens.

8

Ma mère avait une trop petite maison pour que cela fût remarqué, et madame de Caseaux ne recevait qu'un parti.

9

C'est-à-dire en bleu tout uni avec des boutons ayant le chiffre.

10

La bourse attachée au collet de l'habit; ce qui faisait que la bourse demeurait au même lieu quand la tête tournait.

11

Excepté l'Escurial, Saint-Ildephonse et Aranjuez, où encore ce qui est luxe tient au pays ou bien aux tableaux que renferment les sitios, il n'y a aucun luxe dans les ameublements ni dans le reste du palais.

12

Il était propre neveu de la Reine de France et de celle de Naples; la duchesse de Parme était archiduchesse d'Autriche (Amélie). Il y a d'elle un beau portrait à Versailles.

13

Ce cabinet fut légué par M. Lesage au Gouvernement, et je pense qu'il a été donné au Jardin des Plantes, c'est-à-dire au Cabinet d'Histoire naturelle. M. Lesage avait assemblé un cabinet de minéralogie très-curieux et très-complet.

14

L'hôtel de Montesson est le même hôtel où eut lieu l'horrible incendie du prince de Schwartzenberg.

15

On voit que le duc de Rovigo ne dit pas vrai lorsqu'il dit que le premier Consul fut de mauvaise humeur contre ceux qui furent à cette fête. Au contraire, il y fit aller les officiers du château.

16

Moustache, le fameux courrier de l'Empereur, y joua un rôle.

17

Qui fut ensuite à la reine de Naples et puis à la princesse Pauline, et que la reine de Naples réclame aujourd'hui, dit-on! mais c'est une erreur… à quel titre?.. l'avait-elle payé?.. dans ce cas, l'Empereur le lui a rendu, et ne l'eût-il pas fait, la couronne de Naples soldait bien des comptes. Il paraît qu'avec elle, elle n'a soldé que celui des rapports de famille.

18

Elle était fort gourmande. Un jour elle m'appela au moment où l'on servait le café. Donnez-moi votre tasse, me dit-elle, et elle y versa une forte pincée d'une poudre d'une couleur de cannelle, puis ensuite elle me dit de boire. Mon café était délicieux. Je lui demandai le nom de ce qu'elle y avait mis pour le transformer ainsi. C'était une poudre de cachou préparée et venant de la Chine. Elle lui avait été donnée par des missionnaires. Toutes les fois que M. de Lavaupalière dînait avec la princesse de Guémené chez madame de Montesson, il rôdait autour d'elle, au moment du café, d'une manière tout à fait comique.

19

Elle avait, à cette époque, 1802 ou 1801, trente-huit ans. Elle mourut en 1817, âgée de cinquante-quatre ans.

20

Madame de Genlis était belle-mère de M. de Valence; elle eut deux filles, l'une d'une grande beauté, mariée à M. de La Woëstine; et l'autre, jolie, gracieuse, charmante, mariée à M. de Valence, qui ne la rendit pas aussi heureuse qu'elle le méritait.

21

Pulchérie était madame de Valence, spirituelle et charmante femme. Elle était encore fort jolie à cette époque.

22

Cette coutume était assez ordinaire dans les grandes maisons; mais surtout dans les maisons royales et les maisons princières.

23

Madame de Custine, belle-fille du général de Custine; qui mourut sur l'échafaud en 1793, était mademoiselle de Sabran.

24

Mesdemoiselles Lolive et de Beuvry étaient à cette époque les lingères les plus renommées; elles furent ensuite lingères de la cour; mais elles étaient déjà un peu vieilles, et avaient été lingères de nos mères. – Plus tard ce fut Minette qui prit leur place dans la mode pour être lingère des jeunes femmes. Elle faisait des choses charmantes, unissant le goût le plus recherché au plus grand luxe. C'est chez elle que j'ai vu une robe de percale, et par conséquent du matin, du prix de 2,500 francs.

25

Une toilette comme je viens de la décrire pouvait revenir à 6 ou 8,000 francs. Un beau cachemire coûtait au moins 1,500 ou 2,000 fr. – Ces canezous très-brodés, 4 ou 500 fr., en raison de la dentelle qui était autour du col, et presque toujours en malines, valenciennes, et souvent en point d'Angleterre ou point à l'aiguille. – Le voile, 1,000 fr., et souvent bien au-delà lorsqu'il était dans une corbeille de mariage. – La montre, 2,000 fr. – La toque, 200 fr., etc. On voit que la chose allait vite.

26

Le premier Consul ne voulait jamais avoir l'air d'aller en aucun lieu par invitation… les demandes eussent été trop fréquentes, et beaucoup n'auraient même pas pu être refusées par lui.

27

Mère du marquis de Custine, dont on va publier un voyage en Espagne, qui continuera à justifier tout ce que le beau talent de l'auteur promettait dans ses Souvenirs de voyage en Italie et en Angleterre. Je connais plusieurs parties de ce voyage en Espagne, admirables de vérité, de description, de chaleur de style, et également belles par la richesse et la profondeur des pensées. M. de Custine est un homme dont l'époque littéraire sera fière. Un talent comme le sien est rare aujourd'hui; au milieu de cette foule de choses, de productions de mauvais goût, on jouit en lisant un ouvrage qui, par la pureté du style et la haute portée des pensées, vous reporte aux beaux temps de notre littérature. J'ai porté ce jugement lorsque M. de Custine publia le Monde comme il est, admirable ouvrage qui grandira comme il le mérite, car il restera. Mon sentiment est le même aujourd'hui qu'alors, seulement il est plus positif, parce que le temps l'a confirmé.

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