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Le Blé qui lève
Le Blé qui lève

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Le Blé qui lève

Язык: Французский
Год издания: 2017
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– On veut vivre. C'est pas la fortune qu'on demande; c'est du pain, et, à condition de se priver de lard, un bout de ruban pour nos filles. Moi, j'en ai une qui grandit. On demande que les marchands acceptent le nouveau tarif: et d'une. Et puis que la corde de moulée ne dépasse pas 90 centimètres de haut. Si les marchands accordent ça, nous rentrons tous au bois; sinon, non. Il nous faut la justice, qu'on a chassée de la forêt.

On l'applaudit pour l'ampleur de sa voix, sa force, sa taille et son absence de peur. Ce fut un triomphe. Ses camarades le reconduisirent, chantant la Marseillaise, jusqu'à la maison du Pas-du-Loup, au seuil de laquelle se tenait, pâle, la grande et belle Marie accourue au cantique. Un des bûcherons, un jeune, passa devant, et dit:

– Il a rudement parlé, le papa. Vive Marie Cloquet! Vive le père Cloquet!

C'était la deuxième fois qu'on l'appelait le père Cloquet. Il n'y fit pas trop attention, étant un peu ému de vin et de gloire; il dit seulement:

– Lureux, parce que tu es jeune, il ne faut pas plaisanter. J'ai fait ce que je devais. J'espère que nous allons réussir. Donne un verre de vin aux amis, Marie, et embrasse-moi.

Et Marie l'embrassa, Marie aux yeux de chèvre, longs, ardents et dorés.

Longtemps après que les hommes eurent bu, et qu'on les eut vus disparaître dans les chemins de la forêt, le père et la fille restèrent sur le pas de la porte, écoutant les voix qui chantaient en chœur, et qui criaient, de plus en plus lointaines: «Vive le camarade Cloquet!»

La gloire fut courte. Déjà dans les premières grèves, Gilbert avait dû réprouver les violences de quelques jeunes. Quand plusieurs bûcherons, au soir d'une discussion de tarifs avec M. Thomas, le gros marchand de bois, avaient proposé d'aller saccager la maison de l'«exploiteur», il avait pris parti contre eux, et fait rejeter leur vengeance. Une autre fois, sommé de se joindre aux compagnons du syndicat, qui avaient résolu de pénétrer dans un chantier et d'en chasser les non-syndiqués, il s'était refusé à quitter sa maison. «Ce n'est pas bien, avait-il dit: ceux qui ne sont pas avec nous ont des femmes et des enfants comme nous, laissez-les venir, et ne les forcez pas à chômer. C'est dur, d'être sans travail.» Une troisième fois, il s'était mêlé au cortège des grévistes, pour voir. Et il avait vu, au milieu de la forêt, une coupe envahie par une bande hurlante et six hommes de Fonteneilles entourés, frappés, et obligés de marcher en tête des grévistes, à travers bois, puis sur les routes. On passait dans les villages. On récoltait des lâches, qui se mêlaient à la troupe. Les prisonniers épouvantés, blessés par leurs sabots, demandaient grâce. «Marchez toujours!» Et ils marchaient suppliants, insultés, dans la clameur des voix qui étouffaient leurs plaintes. Deux d'entre eux finirent par tomber sur le chemin. Alors, dans le crépuscule, il y eut une lutte sauvage. Un homme, un seul, se battit contre dix. Des cris s'élevèrent au bord de l'étang de Vaux, cris de mort, cris d'horreur, si aigus que les maisons cachées sous les arbres entendirent, et fermèrent leurs volets. Cette nuit-là, Cloquet rentra très tard chez lui, les habits déchirés et la mâchoire en sang. Et comme Marie, tremblante, questionnait le père:

– Ne t'émoye pas, dit-il: les autres ont plus de mal que moi.

Depuis lors, il eut, dans la forêt, d'implacables ennemis. Ceux qui l'aimaient le défendirent mal, quand un des meneurs, Supiat, proposa de lui enlever la présidence du syndicat des bûcherons. A la place de Gilbert, le fondateur du syndicat, le porte-parole des ouvriers des bois et des champs de la Nièvre à la réunion de Nevers, on élut son voisin, son vis-à-vis, Ravoux, un chef moins beau, plus jeune et plus fermé, qui dominait les meneurs parce qu'il ne parlait presque pas, et que ses yeux ne décoléraient point. Gilbert continua d'assister aux réunions dans les cabarets de Fonteneilles ou des villages voisins; on l'écoutait, mais on votait contre lui. Les jeunes disaient: «Tu peux remiser, Gilbert; maintenant que la machine est lancée, ne tire pas en arrière.» Beaucoup l'estimaient et n'osaient plus le suivre. Et lui, qui avait le cœur tout simple et fraternel, il souffrait moins d'être relégué au second rang que de ne pouvoir approuver des projets, des mots ou des actes qui offensaient son idée de justice. «Une si belle cause, disait-il, notre pain, notre défense, et ils ne l'aiment pas comme moi! Pas autant!»

Les mois et les années passaient. Marie devenait une femme. Elle allait «à ses journées» dans le bourg et dans les fermes. Elle était grande et toujours plus jolie que n'avait été la mère, bien qu'elle n'eût pas la même douceur de traits ni de manières. Ses pratiques la trouvaient brusque, capricieuse, tantôt «avantageuse à l'ouvrage», tantôt molle et si revêche d'humeur qu'on ne pouvait obtenir d'elle une réponse.

Le père la jugeait de même. Il avait peur d'elle et pour elle. Il songeait au loin, en fauchant le blé, en mordant, au coin d'une haie, le pain apporté de chez lui: «Que fait-elle? Je ne sais d'elle que ce qu'elle veut bien m'apprendre. A son âge, les filles ont des secrets. Quelle pitié, quand les mères ne sont plus!» Mais elle était si tendre avec lui quand il essayait de la gronder! Attentive et inquiète d'abord, elle s'apercevait vite qu'elle n'aurait pas de peine à se défendre contre des commérages sans précision. Elle disait: «Les filles d'ici sont jalouses de moi; comme les gars autrefois étaient jaloux de vous.» Ces soirs-là, elle soignait la soupe, elle tirait de la huche un morceau de lard ou une boîte de sardines conservées, régal des habitants de Fonteneilles. Puis, après le souper, elle s'asseyait près du père, devant le feu, ou derrière la maison où il y avait un verger pas plus long qu'une meule de foin, avec trois pommiers, des groseilliers, un romarin bien vieux, des ruches d'abeilles, et la forêt levée tout autour. Marie caressait le père et se faisait petite à côté de lui très grand. Ils s'asseyaient sur un madrier, qui pourrissait depuis vingt ans le long du mur. C'était rude parfois, de dérider le père. Marie presque toujours y réussissait. «Pourquoi as-tu perdu la pratique des deux sœurs de Durgé? Il paraît que tu as refusé de coudre des sacs, parce que c'était trop dur? Pourquoi m'as-tu laissé tout seul dimanche, jusqu'à cinq heures? Est-ce vrai que tu te laisses faire la cour par ce Lureux, qui n'est pas un travailleur, Marie, pas un homme bien rangé, non plus?» Elle riait si bien que les voisins enviaient la demi-heure de joie que passait Gilbert Cloquet. Lui, il ne croyait pas tout à fait ce qu'elle disait; il se laissait tromper juste assez pour cesser de se plaindre et de parler du passé. «Allons! Marie, il faut me faire honneur, il faut marcher droit, sagement, c'est ce que t'a dit bien des fois l'institutrice, n'est-ce pas? Elle avait raison… Et puis tu me ferais tant de peine si je te voyais mal famée dans la région!» Il avait le sentiment que ses conseils étaient sans force. Il haussait les épaules et demandait: «Apporte-moi ma pipe. Elle m'écoute toujours quand je parle.» La petite fumée bleue montait. Marie se levait pour aller fermer à clef la cabane des poules. Et les étoiles passaient au-dessus d'une maison rétablie dans le silence, mais non point dans la paix.

Un soir, au temps de la récolte des pommes de terre, en septembre 1898, il avait soupé avec le patron de la ferme qui est sur le coteau, en face de la grande digue des étangs; puis, las de la journée, il s'était couché dans un lit depuis longtemps inoccupé, et dont le bois pourrissait au milieu des piles de sacs, des pommes de terre amoncelées, des liens de paille, des vieux harnais qui couvraient presque tout le pavage de la décharge. L'odeur de la terre, son odeur de levain qui s'élève des guérets ouverts, sortait des mottes attachées aux racines et aux lames des outils, et se mêlait à celle des vieux cuirs cirés et moisis. Gilbert Cloquet songeait, sans doute à cause de cela, aux labours qu'il devait faire, prochainement, dans une vallée où la charrue ne rencontrait pas de pierre, et où le froment levait volontiers. Il avait toujours l'esprit préoccupé du travail ou du chômage prochain. Quelqu'un frappa à la porte et entra.

– Ce n'est pas une heure pour déranger le monde, dit rudement Gilbert. Qu'est-ce qu'on me veut?

Il s'assit sur son lit, sa chemise ouverte sur sa poitrine velue.

– Faites excuse, dit un jeune homme qui entra lestement et resta debout au pied du lit; je me suis dépêché, mais je n'ai pas pu arriver plus tôt: je viens de par delà Saint-Révérien, et je vais aller coucher ce soir à la Vaucreuse, où je suis embauché.

– C'est un pays qui m'est ami, dit Cloquet, mais ça ne m'explique pas, Lureux, pourquoi tu viens?

– Vous ne devez pas rentrer de la semaine au Pas-du-Loup, monsieur Cloquet, et votre fille Marie m'a bien recommandé de vous parler au passage.

– Ma fille?

– Oui, dit le gars dans l'ombre, nous nous sommes entendus: elle veut bien de moi, et moi, j'ai mon idée devers elle.

Gilbert ne répondit rien pendant plusieurs minutes. Beaucoup de choses qu'il avait entendu dire contre ce garçon lui revenaient en mémoire. Il eut envie de se lever, en chemise, de le chasser, de lui crier: «Va-t'en, et cherche ailleurs que chez moi!»

Mais l'image de Marie se dressa aussitôt devant lui, de Marie mécontente, froissée, à jamais divisée d'avec lui; il eut peur de la dernière solitude, puis, reportant les yeux sur cet homme attentif, penché un peu, et dont les yeux luisaient d'inquiétude jeune, dans l'ombre de la décharge, il sentit de la compassion pour celui qui, comme lui, gagnait difficilement le pain, au bois, aux prés, au froment, pareil aux oiseaux et, comme eux, changeant de grenier avec les saisons.

– Je ne t'aurais pas choisi, Lureux, parce qu'on te dit dépensier.

– Monsieur Cloquet, je ne bois pas…

– Tu ne bois pas, peut-être, mais tu as le goût de la dépense; tu payes à boire aux autres, et tu joues; il faudra te ranger. Écoute: si, comme tu le dis, Marie est consentante, je le saurai, je ne la contrarierai point. Tu lui feras dire par quelqu'un de tes parents que, pas plus tard que jeudi, après les pommes de terre finies, j'irai causer avec elle.

Quelquefois, il avait rêvé que le gendre futur, l'homme de qui renaîtrait sa race, se jetterait à son cou et le serrerait dans ses bras: et, en ce moment, il eut au cœur la morsure nette de la déception. Non, cela ne se pouvait: plus tard, peut-être, l'amitié viendrait. Il tendit la main à l'homme, qui avait fait le tour du lit et qui s'était approché.

– A présent, mon garçon, dit-il, ne va pas trop vite en amitié avec Marie, et n'entre pas chez moi avant que je n'y sois rentré… parce que, tu me connais, ce n'est pas un mariage qu'il y aurait, c'est un coup de fusil au coin d'un chemin.

Un rire contenu lui répondit.

– Je ferais comme je dis, Lureux!

– Que pensez-vous là, monsieur Cloquet?.. Allons, merci, j'ai de la route à faire dans la nuit; oui, j'en ai… il faut que je parte.

– Tu promets de ne pas t'arrêter au Pas-du-Loup?

– Oui.

La porte se referma, et Gilbert ne dormit pas, car il avait pris trop dur sur lui-même, pour ne pas faire pleurer Marie: et ce fut lui qui pleura.

Il songea qu'il avait toujours été seul, que personne dans le monde, sauf la vieille mère et un peu Adèle, qui étaient mortes toutes les deux, n'avait aimé le pauvre remueur de terre et faucilleur de blé qu'il était. Il pensa: «Pour quoi vais-je vivre maintenant? pour qui? pour moi tout seul? oh! que ça n'est guère!» Le monde, pour lui, finissait là, depuis que les compagnons rejetaient Gilbert Cloquet.

Dans cette même nuit, le cœur battant d'orgueil, de vie et d'amour, Étienne Lureux prenait la traverse, descendait la colline, passait sur la levée, entre les étangs clairs sous la lune, et entrait dans la forêt, pour arriver plus vite au Pas-du-Loup. Il galopait sur le sol bourré d'herbes; il riait; il regardait, au-dessus des taillis, les nuages passer sur la lune et s'emplir de lumière. Puis, dans la grande solitude, s'arrêtant pour souffler, deux fois il cria: «Vive Marie Cloquet! Vive la plus belle fille de Fonteneilles, de Corbigny, de Saint-Saulge et de toute la terre!»

Enfin, les pieds blancs de poussière et de boue, il arriva au hameau. Les cinq maisons, enveloppées par les bois, aux bords du chemin forestier, dormaient. Il s'approcha d'une fenêtre et dit tout bas: «Marie?» Il ne voulait pas que, de la maison en face, Ravoux pût le surprendre. Son visage devint tout pâle, et sa pensée d'angoisse y sculpta un autre visage. «Où est-elle? Morte? Échappée? Marie?» Puis tout à coup, la jeunesse y reparut; les traits se détendirent dans la joie; le contrevent s'ouvrit, et la tête décoiffée de Marie, aux yeux fermés par la demi-lumière de la nuit, se tendit au baiser de l'homme.

– Marie, j'arrive de la ferme de Vaux!

– Tu l'as vu?

– Il n'a pas osé dire non…

– Ah! quelle chance, mon petit Lureux!

Elle demanda, souriant dans le sommeil:

– A-t-il promis de la galette?

– Je n'y ai pas pensé.

– T'es bête, mon pauvre garçon, il en a!

Il causa deux minutes, et, comme il avait promis de ne pas s'arrêter, voulant ne pas trop longtemps mentir à sa promesse, il embrassa de nouveau la jeune fille ardemment, reprit la gibecière qu'il avait déposée à terre, sauta d'un bond jusqu'au milieu du chemin forestier, et s'échappa. Marie, la tête dans l'ouverture des contrevents, les yeux grands, les lèvres rieuses, le cœur gonflé d'orgueil, regardait l'homme qui l'arracherait à la vie dépendante et à l'ombre de ces bois où il disparaissait.

Peu après, Étienne Lureux épousa Marie Cloquet. Le père, voyant sa fille éprise de ce joli homme, ne sut rien refuser. Il céda à cette sorte d'éblouissement où le bonheur des enfants jette parfois les mères; il crut tout ce qu'elle affirmait; il voulut tout ce qu'elle demanda. Pour qu'elle fût plus heureuse qu'il n'avait jamais été, il lui prêta tout son argent, quatre mille francs qu'il avait, en se privant toute sa vie, économisés et placés. Le rêve du père fut réalisé par la fille. Marie prit à bail une petite ferme de douze hectares nommée l'Épine, toute proche de la forêt, enclavée presque entièrement dans le domaine de Fonteneilles, et qui, vendue en justice, après la mort d'un paysan propriétaire de Crux-la-Ville, avait été achetée tout récemment par le principal créancier hypothécaire, un négociant d'Avallon. Elle eut une domestique, qui faisait tout le gros ouvrage, un mobilier neuf, des vaches, des brebis, deux juments, des bijoux lourds et peu titrés, et le droit de regarder de haut ses anciennes compagnes les lingères, coureuses de journées. Il est vrai qu'elle devait beaucoup d'argent dès son entrée en ferme, sans compter l'emprunt fait au père. Mais Lureux jurait qu'en moins de cinq années, il se faisait fort de ne devoir plus rien à personne. En vain la mère Justamond, matrone qui parlait franc, avait dit à son voisin, la veille de la signature de l'acte: «Excusez-moi si j'ai l'air de m'occuper de vos affaires, Gilbert Cloquet, mais faut pas tout donner aux enfants. Ils prennent ce qu'on leur donne, comme si c'était leur dû. Ils promettent de la reconnaissance, mais c'est une graine qui ne lève guère souvent.» Il avait répondu: «Mère Justamond, j'ai travaillé pour ma femme, et elle est morte. J'ai travaillé pour les camarades, et ils commencent à me lâcher. J'essaye à présent d'avoir l'amitié de ma fille et de mon gendre: faut me laisser faire.»

Depuis lors, plus de sept années s'étaient écoulées, et bien des choses, autour de Gilbert, avaient changé.

La Nièvre, tout au moins dans la partie vallonnée de Corbigny, de Saint-Saulge et de Saint-Benin-d'Azy, était devenue un grand pays d'élevage. Les bœufs blancs, les vaches blanches, les chevaux de trait, au poil noir, erraient en troupes deux fois plus nombreuses dans les pâturages. Et les pâturages, pour les nourrir, s'étaient multipliés. L'herbe avait monté du creux des vallées sur le flanc des coteaux. Elle remplaçait les froments et les seigles; elle mordait les héritages de tout temps réservés aux chenevières. Le beau mamelon de la Vigie, au sommet jadis labouré chaque année, était maintenant tout en haut lisse et vert comme une émeraude, et plus de la moitié des terres qui couvrent les pentes portaient la même verdure sans cesse remontante, et qui n'est ressemée qu'après un temps bien long. Tout ce massif nivernais ressemblait à un parc. Le silence augmentait dans la campagne moins travaillée. Quelque chose de primitif et d'apaisé y rentrait, avec l'ombre des bois tournant sur les prairies. On voyait, aux foires de Corbigny ou de Saint-Saulge, plus de deux mille têtes de bétail rassemblées. Les marchands de toute la France et de l'étranger affluaient. Les fermiers devenaient riches. Mais les journaliers se plaignaient, car il y avait moins de mottes à remuer, moins de moissons à couper. Les machines aussi leur volaient des journées, par centaines. Depuis longtemps on ne battait plus au rouleau, et les fléaux, à cheval sur les solives, ne remuaient plus qu'au vent qui passe entre les tuiles. C'étaient maintenant le semoir, la faucheuse, la faneuse, la moissonneuse, qui faisaient la besogne antique des hommes.

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