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Voyages loin de ma chambre t.2
Voyages loin de ma chambre t.2

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Voyages loin de ma chambre t.2

Язык: Французский
Год издания: 2017
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Ce soir même, je reprends le chemin de Bretagne, mes pérégrinations sont finies et… mes descriptions aussi; mais peut-être encourageront-elles mon cher fils à venir à son tour visiter le Jardin de la France, cette terre riche et souriante, cette belle Touraine, constellée de souvenirs… capitonnée de châteaux.

ÉTÉ 1889

JOURNAL D’UNE CAMPAGNARDE

à PARIS

PENDANT L’EXPOSITION

A mon fils Bertrand.

Je m’intéresse vivement à ton beau voyage à travers l’Algérie, la perle de nos colonies françaises. Tu as visité Alger, la superbe, la reine de ces lieux; Oran, la ville maritime; Constantine, la ville forte par excellence; Bône, l’élégante, la coquette, et qui remplace aujourd’hui l’antique Hippone de saint Augustin; Bougie, la marraine de toutes les chandelles de cire ou de stéarine; Blidah, la patrie poétique des roses parfumées et des oranges exquises. Tu veux maintenant connaître cette campagne algérienne si nouvelle pour toi; t’enfoncer dans la brousse et traverser les plaines d’Alfa; gravir les pentes escarpées de l’Atlas, côtoyer les sinuosités sablonneuses du désert, courir le long des grèves rocheuses qui festonnent la mer bleue. Les beautés grandioses de la nature sauvage t’attirent et te retiennent, et pendant que tu les admires, moi je réponds à l’appel de la civilisation qui convie le monde entier à ses fêtes, à ce spectacle unique: l’Exposition!

Puissent ces pages, faible écho de mes impressions t’intéresser à leur tour, te donner une idée de ces grandes joûtes pacifiques du progrès; un aperçu de toutes les merveilles que renferme aujourd’hui Paris qu’on pourrait appeler en ce moment le salon de l’univers.

ARRIVÉE A PARIS

Lundi soir, 16 Septembre 1889.

Depuis quelques heures je suis à Paris… Dans ce grand Paris entrevu si souvent dans mes rêves, et que je vais trouver ou plus beau ou peut-être moins beau qu’eux. Le rêve est une féerie sans limites, la réalité a toujours des bornes. Ah! que je suis impatiente de connaître toutes ces belles choses qui caressent ma pensée depuis tantôt cinq mois! Demain, dès que l’horloge aura sonné neuf coups, l’heure réglementaire de l’ouverture de l’Exposition, j’en aurai franchi le seuil.

Nos plans sont dressés. Quatre jours par semaine nous irons à l’Exposition, les autres jours nous visiterons Paris; nous nous reposerons aussi de temps en temps, on ne peut pas tout voir à la fois, et pour bien classer ses souvenirs, il faut que la mémoire puisse s’assimiler les choses et les mettre en place, autrement ce serait le chaos.

Je suis arrivée par la belle gare Saint-Lazare: un monde déjà à elle toute seule. J’ai pris une voiture et fouette cocher! Plus heureuse que cette grande dame du siècle de Louis XIV, qui aurait tant voulu se voir passer en carrosse, moi j’ai eu cet agrément, rien qu’en jetant un coup d’œil rapide sur toutes les grandes glaces qui ornent la devanture des magasins.

Quelle animation, quel mouvement, quel tapage! Ah! que je suis loin du calme des champs! Ce soir je vais m’endormir au bruit de mille rumeurs confuses qui me rappelleront la voix du vent dans les bois. Cette nuit je me croirai bercée par la rafale bourdonnante de nos plages bretonnes… Ce sera le doux songe des paupières closes et du pays natal, en attendant le grand rêve des yeux ouverts: Paris et l’Exposition!..

Mardi, 17 Septembre 1889.

Première impression

Entrées à l’Exposition aujourd’hui, cent soixante-deux mille huit cents personnes.

Je suis émerveillée, enthousiasmée!.. Quelle féerie pour les yeux et la pensée que cette Exposition! et quelle haute idée elle donne de l’intelligence humaine. C’est un amoncellement de splendeurs à donner le vertige.

Nous sommes arrivées par le Trocadéro, cette entrée grandiose entre toutes (il y en a vingt-trois) permet d’embrasser d’un coup d’œil l’aspect général de l’Exposition. De l’avenue de Suffren au quai d’Orsay, cette première impression est inoubliable.

L’intérêt et la curiosité s’éveillent au plus haut point. Tous les âges et tous les goûts peuvent se trouver ici dans leur élément.

Cette joute pacifique, cette grande exhibition ne renferme-t-elle pas une incomparable leçon de choses? Tout ce que l’esprit humain a inventé, dans le domaine de l’art et de l’industrie, de la science et de l’imagination, se trouve là. C’est aussi l’histoire palpable, vivante, de tous les produits naturels et si variés du globe. C’est le monde entier parlant au yeux et à l’imagination.

Le terre à terre des choses pratiques et usuelles les plus minimes coudoie l’idéal des choses artistiques et les plus vastes conceptions; la matière marche de front avec les productions les plus éthérées de l’esprit, et tout cela savamment classé, groupé, accumulé, dans le cadre le plus magistral qui se puisse rêver; et l’on reste stupéfait de tant de merveilles; tout ce qu’on voit paraît extraordinaire, c’est une contemplation sans fin.

Voilà un stock formidable de souvenirs qu’il serait bien difficile d’emmagasiner dans le cerveau; mais dont la mémoire retiendra ce qui l’aura frappée davantage.

L’Exposition de 1889 est la septième des Expositions universelles et la quinzième des Expositions nationales.

La première qui se tint au Champ de Mars en 1798, au sortir de la tourmente révolutionnaire comptait cent dix exposants; celle d’aujourd’hui en compte trente-huit mille.

Elle couvre une surface totale de soixante-dix hectares. Le visiteur intrépide qui voudrait tout parcourir en un jour aurait fait à la fin de ses étapes quarante kilomètres.6

La tour Eiffel est le clou, elle vous saute aux yeux avant même qu’on soit à Paris: mais, au dire des ingénieurs, le Dôme Central et la Galerie des Machines ne sont pas moins remarquables. C’est une trilogie de merveilles.

Sans compter tous les pavillons, les façades, les innombrables constructions qui représentent les cinq parties du monde, il y a sept palais principaux: Le beau palais du Trocadéro, le palais des Arts libéraux, où l’on voit dans tout son développement l’histoire du travail à travers les âges; le palais des Beaux-arts, encombré de chefs-d’œuvre: sculptures, peintures, gravures, dessins; le palais des Industries diverses, aussi magnifique, aussi resplendissant dans son genre; le palais des Machines, où l’esprit reste pétrifié d’étonnement et d’admiration; le palais du Pétrole, mais oui, cette huile minérale, découverte du XIXe siècle a son palais où sont représentés les appareils servant à son extraction; en un mot tout le matériel nécessaire à cette immense exploitation, ainsi que des échantillons de pétrole et de naphte. Cela intéresse les gens de la partie. Quant aux simples visiteurs, ils s’amusent un instant à regarder les grandes vues panoramiques qui décorent les murs intérieurs et qui représentent les ouvriers au travail sous le ciel d’Asie, d’Amérique et même d’Europe, au Caucase. Ces vues sont bien faites, et l’on comprend tout de suite que ces ouvriers ne sont pas de même race. Enfin le palais de l’Alimentation, le palais tentateur.

Et maintenant que j’ai effleuré toutes ces belles choses, voici mon opinion.

Il est impossible, même à l’imagination la plus féconde, de se faire de loin une idée de l’Exposition. Quant à ceux qui l’ont visitée, ils sont quand même dans l’impossibilité de la bien faire comprendre à ceux qui ne l’ont pas vue. Sans doute ces derniers pourront se rendre un compte exact de bien des choses prises séparément; ils pourront lire tous les livres traitant ce sujet aussi vaste qu’intéressant; ils pourront se représenter un palais, une galerie, un atelier, une usine; on pourra leur donner des détails, beaucoup de détails; mais cet ensemble incomparable, comment l’exprimer!

Mercredi, 18 Septembre 1889.

Le Jardin, le Musée et le Palais du Luxembourg

Buffalo-Bill

Temps délicieux, chaud le jour, tiède le soir; journée bien remplie, comme le seront, j’espère, toutes celles qui doivent suivre.

Nous avons passé la matinée en France, au Luxembourg, et l’après-midi au Mexique, à Buffalo-Bill.

Quel admirable jardin, que ce jardin du Luxembourg! il vous conduit jusqu’à la belle fontaine de l’Observatoire, au milieu de pelouses parfumées, à travers des bois ombreux qui vous donnent l’illusion d’une vraie campagne; ici on peut s’isoler, se croire aux champs et rêver à l’ombre des futaies, que l’automne d’un coup de son pinceau fantaisiste va rougir d’abord et bientôt effeuiller, hélas!

Ces belles statues, ces balustres élégants, ces bassins limpides évoquent les souvenirs d’antan. Il me semble que j’entrevois dans les allées, l’ombre de Marie de Médicis. Je crois entendre sous les charmilles chuchoter les grandes dames de la Cour.

En descendant ainsi les âges, j’arrive à des souvenirs plus cruels et plus récents. C’est dans le Jardin du Luxembourg qu’un grand nombre de fédérés furent enterrés, pendant la Commune; et ce mot si vrai d’un penseur me revenait en mémoire: «Tant que le peuple fera de la politique il ne sera pas heureux! Toute horreur appelle une autre horreur, et c’est comme cela que les représailles engendrent les haines éternelles.»

Pour chasser cette triste évocation, je me suis amusée à suivre la flottille en miniature que les enfants lancent sur le grand bassin, à voir les canards s’ébattre dans les ruisseaux et les hardis moineaux quémander familièrement les miettes de pain qu’un public, amant de la belle nature, ne leur marchande point.

J’ai admiré les orangers séculaires qui ont leurs parchemins comme ceux de Versailles. Ce ne sont plus des arbustes mais des arbres vivant dans des caisses, véritables petites maisons roulantes.

Les nombreuses statues qui ornent ce magnifique jardin et principalement les deux côtés de la grande terrasse sont pour la plupart des œuvres importantes au point de vue de l’art. J’y ai remarqué Sainte Geneviève, la patronne de Paris, Velléda la prophétesse des Gaules, des reines et des princesses.

Très belle la fontaine de Médicis, œuvre de Jacques Debrosse; charmants aussi les quatre groupes représentant plus loin l’Aurore, Le Jour, Le Crépuscule et la Nuit. Je regrette qu’une plaquette aux pieds de chaque statue n’indique pas et son nom et celui de l’auteur, même réflexion pour les Musées où il faut avoir un livret, consulter le catalogue, chercher le numéro; la plaquette simplifierait bien les choses et le nom de l’auteur se fixerait avec l’œuvre même dans le souvenir.

Le Musée du Luxembourg qui a quitté le Palais pour s’installer dans les serres restaurées ad hoc, n’a rien perdu au change. Il est dans de bonnes proportions pour être bien vu, il est tranquille, recueilli et l’on regarde à l’aise, ce qui est un grand agrément, les sculptures et les peintures qu’il renferme. La sculpture est contenue dans une salle unique de quatre cent trente-deux mètres carrés. La peinture qui occupe deux salles présente les œuvres les plus remarquables des artistes vivants. C’est comme l’antichambre du Louvre, où l’on n’est pas pressé d’entrer. On s’attarde d’autant plus volontiers dans l’antichambre, qu’il n’y a que les morts qui puissent entrer au Louvre. C’est là seulement qu’ils reçoivent la consécration suprême de leur talent, le couronnement de leur gloire.

Après le Musée, j’ai pu visiter le Palais.

C’est Marie de Médicis, qui prenant pour modèle le Palais Pitti à Florence posa en 1615 les fondations du Palais du Luxembourg. Il renferme de superbes appartements; la salle où le Sénat tient ses séances est l’ancienne salle de théâtre.

Très belles aussi, la galerie des bustes, la salle du trône, la chambre de Marie de Médicis; à remarquer encore le grand escalier aux monumentales proportions et la chapelle un peu négligée aujourd’hui, puisque depuis 1875, on n’y a pas dit la messe une seule fois.

Nous sommes rentrées, l’appétit bien aiguisé. Le fait est qu’à Paris on se dépense tant, qu’on a besoin de renouveler confortablement ses provisions de forces et de santé, pour garder son équilibre. Deux heures viennent de sonner, en route pour le Mexique!

Nous voici donc en pleine tribu de Peaux-Rouges.

C’est un vrai village, non bâti, mais composé d’un grand nombre de tentes en toile blanche, meublées sommairement de quelques tapis, de quelques peaux, dont s’enveloppent ces exotiques pour dormir. Les tentes des chefs sont un peu plus hautes et plus confortables, on y aperçoit quelques meubles, des sièges, une table, un divan; de plus elles sont bariolées de dessins grossiers aux couleurs vives, qui dénotent que chez ces amateurs de chevelures, l’art n’est pas encore sorti de ses langes. Cependant cette promenade à travers ce campement pittoresque, où l’on entrevoit de grands gaillards cuivrés qui ressemblent à des bandits, ne manque pas d’originalité, et me paraît l’une des principales attractions du spectacle qu’on va chercher à Buffalo-Bill.

Un vaste cirque solidement construit, le plus grand du monde, dit le programme, permet à plusieurs milliers de personnes de prendre place à la fois; le fond du cirque est tendu d’immenses toiles peintes, représentant un coin de la terre mexicaine; ce décor, ce trompe l’œil est d’un bel effet et prête à l’illusion. On rêve un instant pampas, savanes et forêts vierges.

Le personnel est fort nombreux: deux cents chevaux, poneys et buffles sauvages, deux cent cinquante Indiens, pionniers, trappeurs, cow-boys, chasseurs, cavaliers; ces derniers sur leurs chevaux, sans selle, exécutent des fantasias endiablées. Assez curieuses la danse de la Guerre et de la Plume, la chasse au lazo des chevaux fuyant et galopant en liberté.

L’attaque d’un convoi par les Peaux-Rouges manque un peu de prestige; on sent trop que ce n’est pas vrai. Un antique carrosse, dans lequel on fait monter quelques-unes des personnes de marque venues à la représentation, apparaît et parcourt la piste, ce qui simule le voyage; puis soudain retentissent des cris terribles et des coups de feu, le carrosse est entouré de sauvages, il y a lutte, combat, mais enfin tout se termine heureusement, comme dans les contes moraux: la horde sauvage est repoussée avec perte et les honnêtes voyageurs continuent tranquillement leur route.

Ce qu’il y a de très remarquable, c’est l’adresse des tireurs, hommes et femmes, Miss Oakley particulièrement, elle brise avec une rapidité et une précision extraordinaires des boules de verre lancées dans l’espace, sans prendre à peine le temps de les viser.

Nous avons vu travailler les deux bronchos ramenés d’Amérique par le grand peintre Rosa Bonheur, celui-ci n’ayant trouvé personne pour les dresser les a offerts au colonel Cody qui avec ses Mexicains et ses cow-boys est venu à bout de les dompter.

En somme grand bruit à ces représentations, beaucoup de cris et de coups de fusils, beaucoup de chiens, de buffles, de chevaux et de sauvages, n’en déplaise au colonel Cody, un des héros (de théâtre) du moment, et que Paris qui est vraiment la meilleure ville du monde invite à ses fêtes et acclame comme s’il était un vrai héros. Tous ces gens là sont bien d’une autre race que la nôtre et voilà sans doute pourquoi on les accueille si bien. On aime le changement.

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1

Ouvrage publié en 1661, Le Paradis de la Touraine, par le père Martin Martineau, carme déchaussé.

2

Rayonnant.

3

Elles se composent de lés de toile de 3 ou 4 mètres de hauteur sur 80 de largeur. Les unes sont à fond d’or ou d’argent, les autres à fond de couleur, enjolivées d’arabesques, de fruits, de fleurs, d’oiseaux, quelques-unes ont des personnages, et représentent une chasse. Le curieux, c’est que ces ornements ne sont pas le fait d’un pinceau habile, tous les dessins sont des applications de tontures de laine, ce qui leur donne le riche aspect du velours. Elles ont dû être fabriquées sur place. Elles ont servi de modèle à la restauration de plusieurs châteaux de la Renaissance. C’est à Blois qu’on les a imitées pour la première fois.

4

Il paraît qu’on ne peut plus visiter Chenonceaux, le Crédit Foncier qui avait acquis ce domaine l’a revendu à un Américain du Sud, Monsieur Terry, qui l’aime passionnément, jalousement même et l’habite avec sa famille. Les Touristes ne pouvant plus visiter Chenonceaux en sont réduits à saluer de loin la noble demeure tout en promenant dans le parc dont l’accès n’est pas interdit.

5

Depuis ma visite à Beaujardin, le propriétaire est mort; tous les animaux ont été vendus, et ce domaine a changé de maître et de destination.

6

L’exposition de 1855 qui occupa cent soixante huit mille mètres carrés, dura du 15 mai au 15 novembre. Le nombre des exposants fut de vingt-trois mille neuf cent cinquante quatre; celui des visiteurs de cinq millions cent soixante mille. Les entrées payantes produisirent trois millions deux cent mille francs.

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