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Œuvres complètes de lord Byron, Tome 10
22 septembre 1812.
Cher Milord,
«Dans un jour ou deux je vous enverrai quelque chose que vous serez parfaitement libre de laisser là si vous ne le trouvez pas bon. J'aurais désiré avoir plus de tems; enfin, je ferai de mon mieux; trop heureux si je puis vous être agréable, quand bien même je devrais déplaire à cent rimailleurs et à la partie éclairée du public.
»À vous pour toujours, etc.
BYRON.
»Gardez-moi le secret, ou je vais me voir assiégé par tous les concurrens rejetés, et peut-être sifflé par une cabale.»
LETTRE XCVII
À LORD HOLLANDCheltenham, 23 septembre 1812.
«Voilà enfin! J'ai marqué quelques passages avec des variantes, choisissez, ajoutez, retranchez, coupez, rejetez, détruisez, faites-en ce que vous voudrez, je m'en remets à vous et au comité que vous n'aurez pas cette fois appelé ainsi a non committendo. Que vont-ils faire! que ferai-je moi-même avec les cent-un troubadours repoussés? De quel terrible concert ils vont vous assaillir! Attendez-vous à voir les mauvais vers pleuvoir sur vous. Je désire que mon nom ne transpire pas jusqu'au jour fatal. Je ne serai pas en ville, ainsi que m'importe après tout? au moins ayez un bon acteur pour le lire. Elliston est, je crois, l'homme qu'il nous faudrait, ou bien Pope. Pas de Raymond, je vous en conjure au nom de l'harmonie.
»Les passages marqués d'un trait dessus et dessous, le sont pour que vous choisissiez entre les épithètes et autres ingrédiens poétiques.
ȃcrivez-moi, je vous prie, un mot, et croyez-moi toujours votre, etc.
»Mes complimens et mes respects à lady Holland. Aurez-vous la bonté d'adopter l'une des deux versions et d'effacer l'autre, sans quoi notre lecteur se trouvera embarrassé comme un commentateur, et pourrait par hasard nous les débiter toutes deux. Si ces petits vers ne vous conviennent pas, je me remettrai à l'enclume et vous ferai de nouveaux endecasyllabes 26.
Note 26: (retour) Les lettres de 97 à 107, ne sont absolument relatives qu'au choix de certaines épithètes à la place de certains mots, dans les vers du Prologue pour la réouverture du théâtre de Drury-Lane; il est impossible de faire passer de pareils détails dans une autre langue: ils y seraient toujours presqu'incomprehensibles et sans aucun intérêt.(N. du Tr.)
LETTRE CVII
À M. MURRAYCheltenham, 5 septembre 1812.
«Envoyez, je vous prie, ces dépêches et un numéro de la Revue d'Édimbourg avec le reste. J'espère que vous avez écrit à M. Thompson, que vous l'avez remercié de ma part pour son présent, et que vous lui avez dit que je m'estimerai vraiment heureux de faire ce qu'il désire. Où en êtes-vous? Et le portrait, quand viendra-t-il couronné de lauriers et supporté par quelques méchans vers, orner ou enlaidir quelques-unes de nos tardives éditions?
»Envoyez-moi Rokeby. Que diable ce peut-il être? N'importe, il est bien apparenté et sera favorablement introduit dans le monde. Je vous remercie de votre politesse. Je ne me porte pas trop mal; mais mon thermomètre poétique est au-dessous de zéro. Que voulez vous me donner à moi ou à mes ayant-cause, pour un poème en six chants (quand il sera terminé, point de vers, point d'argent), dans un genre aussi semblable aux deux derniers qu'il me sera possible? J'ai quelques idées qui pourront prendre un corps; et d'ici l'hiver j'aurai beaucoup de loisir.
»P. S. Ma dernière question est tout-à-fait dans le style de Grub-Street; mais j'ajouterai avec Jérémie Diddler, je le demande seulement pour le savoir. Envoyez-moi Adair, sur la Diète et le Régime, dont Ridgway vient de donner une nouvelle édition.»
LETTRE CVIII
À M. MURRAYCheltenham, 14 septembre 1812.
«Les paquets contenaient des lettres et des pièces de vers, tout cela, à une exception près, anonyme et flatteur, et marquant beaucoup d'inquiétude pour ma conversion de certaines hérésies dans lesquelles mes honnêtes correspondans pensent que je suis tombé. Les livres sont des présens tendant aussi à ma conversion: la Connaissance du christianisme et le Bioscope ou Cadran solaire de la vie religieuse expliquée. Je vous prie de vouloir bien vous charger de mes remerciemens envers l'auteur du premier de ces ouvrages (Cadell, libraire), pour sa lettre, son cadeau et surtout sa bonne intention. Le Bioscope contenait une pièce de vers manuscrite. Je ne sais de qui; mais certainement de quelqu'un qui a l'habitude d'écrire et d'écrire bien. Je ne sais point si c'est l'auteur du Bioscope qui y était joint; mais qui que ce soit, si vous pouvez le découvrir, remerciez-le pour moi de tout mon cœur. Les autres lettres étaient des lettres de dames, par qui je ne demande pas mieux que de me laisser convertir; si je puis parvenir à les connaître, et qu'elles soient jeunes, comme elles prétendent l'être, je serais charmé de les convaincre de ma dévotion. J'ai reçu aussi une lettre de M. Walpole sur les affaires de ce monde, et j'y ai répondu.
»Ainsi vous voilà l'éditeur de Lucien? On me promet une entrevue avec lui; je vous demanderai, je crois, une lettre d'introduction pour lui, puisque les dieux l'ont rendu poétique. De qui cette lettre pourrait-elle mieux venir que de son éditeur et du mien? N'est-ce pas une trahison à vous d'avoir affaire à l'un des alliés du grand ennemi, comme le Morning-Post appelle son frère?
»Et mon livre sur la diète et le régime, ou est-il? Je suis impatient de lire le Rokeby de Scott: envoyez-moi le premier exemplaire. L'Anti-Jacobin Review est très-bien écrite; elle n'est point du tout inférieure au Quarterly, et certainement elle a cet avantage d'être un peu moins innocente. En parlant de cela, avez-vous rassemblé mes livres? J'ai besoin de toutes les Revues, au moins des Revues critiques, trimestrielles et mensuelles, etc., portugaises et anglaises, extraites et reliées en un seul volume pour mes vieux jours. Mettez en ordre, je vous prie, mes livres en langue romaïque; redemandez à Hobhouse les volumes que je lui ai prêtés: il les a eus assez long-tems. S'il arrive quelque chose, faites-moi l'amitié de m'écrire un mot: nous serons plus proches voisins cet hiver.
»P. S. On s'est adressé à moi pour écrire le discours d'ouverture de Drury-Lane; mais dès que j'entendis parler de concours, je renonçai à lutter contre Grub-Street tout entier, et jetai au feu quelques vers que j'avais ébauchés! Je l'ai fait par respect pour vous, bien certain que vous mettriez à la porte celui de vos auteurs qui s'aviserait de concourir avec ce ramas de méchans écrivains. Il n'y aurait pas eu de gloire dans le triomphe, et la défaite eût été ignoblement honteuse. Je me serais étouffé, comme Otway, avec un pain de quatre livres 27. Ainsi rappelez-vous bien que je n'ai eu, et que je n'ai rien démêler avec ce prologue; je vous en donne ma parole d'honneur!»
Note 27: (retour) L'illustre auteur de Venice Preserved (le Manlius du répertoire français) s'étouffa en mangeant avec trop d'avidité un pain de quatre livres encore chaud que l'on venait de lui donner par charité. On sait qu'il languissait dans une affreuse misère.(N. du Tr.)
LETTRE CIX
À M. WILLIAM BANKESCheltenham, 28 septembre 1812.
Mon Cher Bankes,
«Quand vous m'aurez dit comment les gens peuvent être intimes à soixante-dix lieues, je m'avouerai coupable et j'accepterai vos adieux. À regret cependant, car vous ne me donnez pas de meilleure raison que mon silence; et il n'a d'autre cause que le souvenir de vous avoir entendu dire que vous ne détestiez rien tant que d'écrire et de recevoir des lettres. En outre, comment faire pour trouver un homme qui a un si grand nombre de domiciles? Si j'avais eu l'intention de vous écrire dans ce moment, c'eût été dans votre bourg, où je vous croyais naturellement au milieu de vos commettans. Aussi aujourd'hui, en dépit de M. N*** et de lady W***, je vais vous rendre aussi heureux que la poste de Hexham me le voudra bien permettre. Je vous assure que je vous suis fort obligé de penser à moi de quelque manière que ce soit; et que, malgré cette surabondance d'amitié dont vous me supposez surchargé, je ne saurais jamais me passer de la vôtre.
»Vous avez appris que Newsteadt est vendu pour la somme de 140,000 livres sterlings 28, dont 60 restent hypothéquées sur la propriété pendant trois ans, et rapportent intérêt, bien entendu. Il est probable que Rochdale se vendra bien aussi, en sorte que mes affaires financières commencent à s'améliorer. Voilà déjà quelque tems que je suis à boire les eaux, parce que ce sont des eaux à boire, qu'elles sont très-médicinales, et qu'elles ont suffisamment mauvais goût. Dans quelques jours j'irai chez lord Jersey, mais je reviendrai bientôt ici, où je suis presque seul, où je sors très-peu, et où je savoure dans toute sa volupté le dolce far niente. Que faites-vous en ce moment? je ne saurais le conjecturer, même par la date de votre épître; vous ne dansez pas, j'espère, au son de la cornemuse dans le salon des Lowthers. Nous en avons un ici en mauvais état: le pauvre diable est atteint d'une phthisie. On m'a dit, dans la misérable auberge où je suis d'abord descendu, que vous étiez passé par ici précisément la veille du jour où je suis venu dans ce pays-ci. Nous avions excellente compagnie; d'abord les Jersey, les Melbourne, les Cowper et les Holland: ils sont tous partis; et les seules personnes que je connaisse sont les Rawdon et les Oxford, avec quelques autres de généalogies moins anciennes.
Note 28: (retour) Environ 2,800,000 fr.(N. du Tr.)
»Je ne les dérange pas beaucoup. Quant à vos bals, vos assemblées, on n'y songe même pas dans notre philosophie! Avez-vous lu le récit d'un accident affreux arrivé l'autre jour sur la Wye? douze personnes noyées, et M. Rossoe, un gros gentleman, qui avait dû la vie à un croc de bateau ou un trident, pria qu'on le rejetât dans l'eau, parce que sa femme avait été sauvée… non, noyée! comme s'il n'aurait pas pu s'y jeter lui-même, s'il l'avait voulu; mais cela passe pour trait de sensibilité. Que les hommes sont d'étranges animaux dans la Wye et dehors!
»Il me reste à vous demander un million de pardons pour ne m'être pas acquitté de vos commissions avant de partir de Londres; mais si vous saviez la masse d'ennuyeux engagemens et d'obstacles que j'avais sur les bras, je suis sur que vous ne m'en voudriez pas. Quand s'assemblera le nouveau parlement? Dans soixante jours, je présume, à cause des affaires d'Irlande; les élections de ce pays demanderont plus de tems que n'en comporte la loi. Quant à la vôtre, elle est sûre naturellement, cela n'est pas une question. Salamanque est le mot d'ordre du ministère, et tout ira bien pour vous. J'espère que vous parlerez plus souvent; je suis sûr du moins que vous le devriez, et que l'on s'y attendra. Portman veut donc courir encore une fois la chance? Bon soir.
Je suis toujours votre très-affectionné,
Νωαιρων 29.
Note 29: (retour) Signature qu'il employait souvent à cette époque.
LETTRE CX
À M. MURRAYCheltenham, 27 septembre 1812.
«Je n'ai envoyé aucun discours d'ouverture au comité; sur près de cent, je vous le dis en confidence, pas un n'a paru digne d'être reçu: en conséquence on est revenu à moi; j'ai écrit un prologue, qui a été reçu et qui sera prononcé. Le manuscrit est maintenant entre les mains de lord Holland.
»Mon seul but est de vous avertir que, de quelque manière qu'il soit accueilli au théâtre, vous le publierez avec la première édition de Childe-Harold. Je vous prie seulement, quant à présent, de me garder le secret, jusqu'à nouvel ordre, et de vous procurer une copie correcte pour en faire ce que vous jugerez convenable.
»P. S. Je désirerais que vous en tirassiez quelques exemplaires avant la représentation, afin que les journaux puissent en rendre un compte exact après.»
LETTRE CXI
À M. MURRAYCheltenham, 12 octobre 1812.
«Je ne veux absolument pas que le portrait soit gravé; je vous prie de ne le joindre, sous aucun prétexte, à la nouvelle édition; je désire que toutes les épreuves soient brûlées et la planche brisée. Je paierai toutes les dépenses faites à ce sujet, cela est trop juste, puisque je ne crois pas pouvoir permettre la publication. Je vous demande comme une faveur toute particulière de ne pas perdre un moment pour faire ce que je désire; j'ai mes raisons et je vous les expliquerai quand je vous verrai. Je suis honteux de vous donner tant de peine.
»Je ne sais point comment le public a reçu le Prologue au théâtre; je vois seulement que les journaux en disent du mal, ce dont ne s'embarrasse guère un vieil auteur comme moi. Je vous laisse absolument le maître de le joindre ou non à la prochaine édition, quand nous en donnerons une. Faites, je vous prie, exactement ce que je désire quant au portrait, et croyez-moi toujours, etc.
»Faites-moi l'amitié de me répondre; je ne serai pas tranquille que je ne sache les épreuves et la planche détruites. On dit que le Satirist a rendu compte de Childe-Harold, je n'ai pas besoin de demander dans quel sens; mais je voudrais savoir s'il a reproduit ses anciennes personnalités? J'ai un intérêt plus grand que le mien là-dedans: souvent, dans ces sortes d'articles, on introduit des noms étrangers, surtout des noms de femmes.»
LETTRE CXII
À LORD HOLLANDCheltenham, 14 octobre 1812.
«L'injuste préférence du comité paraît avoir mis en émoi tous les journaux, même celui de mon ami Perry. Il m'a traité assez rudement, tu, Brute! Je compte en retour lui envoyer, par le Morning-Chronicle, la première épigramme qui m'échappera, comme gage de pardon.
»Le comité est-il dans l'intention d'entrer en explication sur sa conduite dans cette affaire? Vous voyez qu'on est assez disposé à l'accuser de partialité. Vous voudrez bien, au moins, me disculper de tout empressement déplacé à me pousser au détriment de tant d'anonymes plus anciens dans le métier, plus habiles que moi, qui n'eussent point été insensibles aux vingt guinées (équivalentes, je crois, à près de deux mille au cours de la banque), sans compter l'honneur. Mais l'honneur, à ce que je vois, ne suffit pas pour un succès dans ce genre de littérature.
»Je voudrais savoir ce qu'il en sera advenu a la seconde représentation, et si quelqu'un aura eu la bonté d'en témoigner quelque satisfaction. Je n'ai vu de journaux que celui de Perry et deux feuilles hebdomadaires. Perry est sévère, les deux autres gardent le silence. Si vous et le comité ne vous repentez pas de votre jugement, je ne m'embarrasserai guère des brillans articles des journaux. Mon opinion à moi, sur ce Prologue, est ce qu'elle a toujours été; je ne suis pas loin, peut-être, d'en penser comme le public.
»Croyez-moi, cher milord, etc., etc.
»P. S. Mes complimens respectueux à lady Holland; son sourire serait une grande consolation pour moi, même à distance.»
LETTRE CXIII
À M. MURRAYCheltenham, 18 octobre 1812.
«Auriez-vous la bonté de faire insérer correctement (sur une copie correcte, car j'écris fort mal) dans plusieurs journaux, et particulièrement dans le Morning-Chronicle, cette parodie d'un genre tout particulier, car les premiers vers sont absolument ceux de Busby 30. Dites à Perry que je lui pardonne tout ce qu'il a dit et pourra dire contre mon Prologue, mais il faut qu'il me permette de critiquer à mon tour le docteur; et qu'il ne me trahisse pas… audi alteram partem. Je ne sais quelle mouche a piqué M. Perry; autrefois nous étions très-bons amis: mais n'importe, faites seulement insérer ceci.
Note 30: (retour) Le docteur Busby, l'un des concurrens, dont il s'était amusé à parodier le prologue, qui n'en avait pas besoin.
»J'ai un ouvrage pour vous, La Valse, dont je vous fais présent, mais il faut me garder l'anonyme: c'est dans le vieux style des Poètes anglais et les Journalistes écossais.
»P. S. Avec la prochaine édition de Childe-Harold, vous pourrez imprimer les cinquante ou cent premiers vers de la Malédiction de Minerve, jusqu'à la strophe:
Mortel (c'est ainsi qu'elle parla), etc.vous arrêtant naturellement où commence la Satire proprement dite; la première partie est la meilleure.»
LETTRE CXIV
À M. MURRAY19 octobre 1812.
«Bien des remerciemens, mais il faut que je paie le dommage, et je vous serai obligé de m'en faire connaître le montant. Je crois que les Adresses rejetées sont, de beaucoup, la meilleure chose qui ait paru en ce genre depuis la Rolliade, et je souhaiterais, dans votre intérêt, que vous en fussiez l'éditeur. Dites à l'auteur que je lui pardonnerais de grand cœur, se fût-il montré vingt fois plus satirique, et que ses imitations ne sont pas du tout inférieures aux fameuses imitations d'Hawkins Browne. Il faut que ce soit un homme de beaucoup d'esprit, et d'un esprit moins désagréable et moins offensant que celui qu'on rencontre généralement dans ces sortes d'ouvrages; somme toute, j'admire beaucoup le sien et lui souhaite beaucoup de succès. Le Satirist, comme vous l'avez pu voir, a maintenant changé de ton; nous voilà délivrés, je crois, des critiques de Childe-Harold. J'ai en mains une Satire sur la Valse, qu'il faudra que vous publiiez anonyme; elle n'est pas longue, deux cents vers au plus, mais cela fera une assez bonne petite brochure. Vous l'aurez sous peu de jours.
»P. S. L'éditeur du Satirist mérite des éloges pour son abjuration; après cinq ans de guerre ouverte! c'est ce qu'on appelle s'exécuter de bonne grâce.»
LETTRE CXV
À M. MURRAY23 octobre 1812.
«Mes remerciemens, comme à l'ordinaire. Vous allez en avant d'une manière admirable; mais ayez soin de satisfaire l'appétit du public, qui maintenant doit en avoir assez de Childe-Harold. La Valse sera prête. Cela fait un peu plus de deux cents vers, avec une espèce de préface, sous forme d'épître à l'éditeur. J'ai quelque envie de donner, avec Childe-Harold, les premiers vers de la Malédiction de Minerve, jusqu'au premier discours de Pallas, parce qu'ils ne contiennent rien contre la personne qui eût pu se plaindre du reste du poème, et que quelques amis pensent que je n'ai jamais rien écrit de mieux; il sera facile de les baptiser du nom de Fragment descriptif.
»La planche est brisée! Entre nous, elle ne ressemblait pas du tout au portrait, et puis la figure de l'auteur, plantée au frontispice d'un ouvrage, ne signifie pas grand chose. Dans tous les cas, un portrait comme celui-là n'eût pas poussé beaucoup à la vente. Je suis sûr que Sanders n'eût pas survécu à la publication de la gravure. À propos, le portrait peut, jusqu'à mon retour, rester dans ses mains, ou dans les vôtres, à votre choix. L'une des deux épreuves restant est bien à votre service, jusqu'à ce que je vous en donne une meilleure; mais il faut absolument que l'autre soit brûlée. Encore une fois, n'oubliez pas que j'ai un compte à régler avec vous, et que tout cela doit y figurer. Je vous donne déjà assez de peine, sans souffrir que vous fassiez des dépenses pour moi.
»Vous savez mieux que moi quelle influence peut avoir à l'avenir, sur la vente de Childe-Harold, tout ce bruit que vient d'occasioner le Prologue L'autre parodie qu'a reçue Perry est, je crois, la mienne. C'est le discours du docteur Busby mis en vers burlesques. Vous allez demeurer dans Asbermale-Street; j'en suis charmé, nous serons plus proches voisins. Je suis au moment d'aller chez lord Oxford, mais l'on m'y renverra mes lettres: Si vous en avez le loisir, toutes communications de votre part seront reçues avec plaisir par le plus humble de vos scribes. Est-ce M. Ward qui a rendu compte dans le Quarterly-Review de la Vie de Horne Tooke? L'article est excellent.»
LETTRE CXVI
À M. MURRAYCheltenham, 22 novembre 1812.
«À mon retour de chez lord Oxford, j'ai trouvé ici votre aimable billet; je vous serai obligé de garder les lettres en question, et celles qui pourraient encore être adressées de même, jusqu'à ce qu'à mon retour en ville je vienne les réclamer; ce qui sera probablement sous peu de jours. On m'a confié un poème manuscrit, très-long et très-curieux, écrit par lord Brooke (l'ami de sir Philippe Sydney), que je voudrais soumettre au jugement de M. Gifford, lui demandant en même tems: 1° s'il n'a jamais été imprimé; 2° si, dans le cas contraire, il vaudrait la peine de l'être? Ce manuscrit fait partie de la bibliothèque de lord Oxford: il faut qu'il ait été dédaigné par les collecteurs de la Bibliothèque des manuscrits harleïens, ou qu'ils n'en aient pas eu connaissance. Le tout est écrit de la main de lord Brooke, excepté la fin. C'est un poème très-long, en stances de six vers. Il ne m'appartient pas de hasarder une opinion sur son mérite; mais si ce n'était trop de liberté, je serais charmé de le soumettre au jugement de M. Gifford, qui, d'après son excellente édition de Massinger, doit être aussi décisif sur les ouvrages de cette époque, que sur ceux de la nôtre.
»Passons maintenant à un sujet moins important et moins agréable. Comment M. Mac-Millan s'est-il permis, sans vous consulter non plus que moi, de mettre le mien en tête de son volume des Adresses rejetées? Cela ne ressemble-t-il pas à un vol? Il me semble qu'il eût pu avoir la politesse de demander permission; bien que je n'eusse pas intention de m'y opposer, et que je laisse volontiers les cent onze se fatiguer de ces basses comparaisons. Je crois que le public est passablement ennuyé de tout cela; je ne m'en suis pas mêlé et ne m'en mêlerai certainement pas, à part les parodies; encore les aurais-je fait disparaître si j'avais su que le docteur Busby avait publié sa lettre apologétique et son post-scriptum: mais j'avoue que sa conduite m'avait d'abord paru toute autre. Quelque charlatan a emprunté le nom de l'alderman Birch pour vilipender le docteur Busby, il eût mieux fait de se tenir tranquille.
»Mettez de côté, pour moi, un exemplaire des Nouvelles Lettres de Junius de Woodfall, et croyez-moi toujours, etc.»
LETTRE CXVII
À M. WILLIAM BANKES26 décembre 1812.
«La multitude de vos recommandations rend à peu près inutile ma bonne volonté de vous en procurer. Les plus notables de mes amis sont de retour: Leake de Janina, Canning et Adair de la ville des croyans. À Smyrne, il n'y a pas besoin de lettres; les consuls sont toujours empressés à rendre service aux personnes honorables. À tout hasard, je vous ai envoyé trois lettres, dont l'une, pour Gibraltar, bien qu'elle ne soit pas nécessaire, vous ouvrira un accès plus facile, et vous donnera de suite une sorte d'intimité dans une famille aimable. Vous verrez bientôt qu'un homme de quelque importance n'a guère besoin de lettres, si ce n'est pour des ministres et des banquiers, et je ne doute pas que vous n'en ayez déjà suffisamment de cette nature.
»Il n'y a rien d'impossible que je vous voie en Orient au printems; si donc vous voulez m'indiquer quelque rendez-vous pour le mois d'août, je vous écrirai, ou bien je m'y trouverai personnellement. Une fois en Albanie, je désirerais que vous vous informassiez du dervis Tahiri, et de Vascilie ou Basile, et que vous présentiez mes complimens aux visirs d'Albanie et de Morée. Si vous vous recommandez de moi près de Soleyman de Thèbes, je crois qu'il s'emploiera pour vous. Si j'avais mon drogman, ou que j'écrivisse le turc, je vous aurais donné des lettres réellement utiles; mais il n'y en a pas besoin pour les Anglais, et les Grecs ne peuvent rien par eux-mêmes. Vous connaissez déjà Liston; moi je ne le connais pas, parce qu'il n'était point ministre de mon tems. N'oubliez pas de visiter Éphèse ainsi que la Troade, et donnez-moi de vos nouvelles. Je crois que G. Foresti est maintenant à Janina; mais, dans le cas contraire, celui qui s'y trouvera se fera certainement un plaisir de vous être agréable. Prenez garde aux firmans; ne vous laissez jamais tromper; l'étranger est mieux protégé en Turquie qu'en quelque lieu que ce soit; ne vous fiez pas aux Grecs, et emportez quelques présens pour les beys et les bachas, tels que montres, pistolets, etc.